26 Avr 2010 |
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Peut-on n’être l’écrivain que d’un seul livre? Y a-t-il un moyen infaillible pour ne jamais perdre l’inspiration ? Doit-on toujours avoir l’exigence d’écrire un texte à portée universelle ? À travers un récit plutôt déjanté, Markus Orths tente d’apporter quelques réponses à ces questions. Prière cependant de ne pas suivre tous ses conseils. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce second roman n’est pas celui de l’auteur allemand Markus Orths, mais il est bien le deuxième – ne lui portons pas malheur - traduit en France. Il paraît tout juste un an après le joli succès d’une Femme de chambre. Dans ce nouveau roman, le rapport de l’auteur à la fiction se trouve un peu modifié puisqu’il est principalement question de la difficulté d’être écrivain. On y retrouve cependant des similitudes avec Femme de chambre: le caractère obsessionnel du personnage et sa désocialisation quasi totale. Martin Grue abandonne ses fonctions de professeur pour se consacrer à l’écriture. Passage vraiment truculent lorsque le narrateur, alors dans une gare, entend une voix – en réalité un haut-parleur - qu’il suppose lui être adressée : on appelle une certaine Erna Scribe. Il interprète aussitôt ce nom, « scribe », comme un appel à l’écriture. En résulte un livre sur l’école rapidement publié qui rencontre un petit succès. Et voilà le jeune auteur parti en train trip pour honorer des « tours de lecture » relativement absurdes à travers tous les Länder d’Allemagne et d’Autriche. Le mythe de l’auteur inspiré et passionnant en prend un coup lorsqu’il raconte l’épisode traumatisant des bouteilles de vin. Á chaque passage dans une librairie – le plus souvent vide en dehors du libraire, sa femme, cousine ou belle-soeur – le narrateur se voit offrir une bouteille de vin. Très vite, cela tourne à l’obsession car Martin ne sait plus comment trimbaler toutes ces bouteilles. Doit-il vider une partie de sa valise ? Racheter un sac ? S’impose alors à lui une solution simplissime: les boire. Résultat : en route pour une cure de désintoxication. Pendant ce traitenment, il se met à rédiger frénétiquement un récit sur le monde littéraire. Véritable pamphlet épinglant tous les acteurs de la chaîne du livre, de l’éditeur au lecteur, en passant par le journaliste et le libraire, il est refusé illico presto par agent et éditeur. Grue constate alors la terrible réalité de sa condition : il ne sait pas écrire sur un autre sujet que la vie qu’il mène. Et il ne mène justement plus aucune vie. La science des rêves ou de l’art de créer scientifiquement l’inspiration S’ensuit une réflexion sur l’inspiration, la recherche d’un sujet, en fait la découverte DU sujet. On pourrait alors aisément rétorquer – et l’on n’aurait pas tort – que Markus Orths ne brille justement pas par l’originalité de son sujet. Pourtant, il faut bien admettre que les remèdes qu’il trouve sont assez tordants. L’on passe d’un projet de roman historique consacré à un comte immortel – figure mythique de tous les aficionados de l’ésotérisme – à un récit mêlant allégrement l’histoire de ce comte et les progrès de la neurobiologie. Mais le narrateur perd vraiment pied lorsqu’il décide d’infliger quelques petites modifications à son cerveau… Bref, on n’en dira pas plus sinon qu’on l’imagine parfaitement en personnage un peu hébété tout droit sorti d’un film de Michel Gondry, entre fantasme puéril et réalité plus désespérée. C’est d’ailleurs lorsque sa sœur met au monde une petite fille, que l’écrivain se retrouve face à la question cruciale : et lui, de quoi va-t-il bien pouvoir accoucher ? C’est en tous cas la question à laquelle Markus Orths tente de répondre avec ce roman cynique et terriblement drôle. Second roman
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