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Nick la guerre
Jeune dipl�m� de Harvard, Nick McDonell publie son troisi�me r�cit sur la guerre en Irak vue depuis les grandes �coles am�ricaines. Alors qu'il pr�parait un livre sur les �lections, il s'est engag� pour Obama. Rencontre.
Soutenu par Joann Didion, Jamaica Kincaid et Tom Wolfe, compar� � Bret Easton Ellis� jolie carte de visite, non ?
Je n�ai en r�alit� pas re�u de soutien de Tom Wolfe mais en effet on peut dire que j�ai pas mal de chance.
Quel r�le avez-vous jou� pr�cis�ment au milieu des �lections am�ricaines ? Vous �tiez auteur, journaliste ?
Je me suis port� volontaire pour la campagne d�Obama alors que je travaillais � un essai sur ce th�me. Quelques jours avant les r�sultats de l'�lection, j�ai tra�n� la femme qui dirige son bureau de campagne dans les banlieues de Philadelphie. N�e � Atlanta, c�est une Sud-Africaine juive, qui a fait sa th�se sur les mercenaires au Congo. Sacr� m�lange. A l�image de cette campagne, j�essaie d��tre tout ce m�lange, plein de choses � la fois.
Comment r�agit l�auteur devant ces �lections et plus g�n�ralement sur les questions politiques ?
Avant j��tais sous-inform� mais depuis je suis tr�s int�ress�. Je pense que la politique est la meilleure foire en ville et �a, si un �crivain en a la possibilit� et l�inclinaison, c�est un tr�s bon th�me � traiter. C�est en fin de compte plus une question de justice que de construction litt�raire pure.
La litt�rature a-t-elle un r�le � jouer face � la politique?
Non, elle n�a pas de r�le sp�cifique. Mais les deux peuvent �tre li�s : certains des meilleurs politiciens sont eux-m�mes d�excellents auteurs. Prenons par exemple cette simple citation extraite du discours d�Obama le 18 mars dernier � Philadelphie, lors de la course � la Maison Blanche.
� Bien s�r la r�ponse � la question de l�esclavage �tait d�j� inscrite dans la Constitution, une Constitution qui avait en son c�ur l�id�al de l��galit� des citoyens devant la loi, une Constitution qui promettait au peuple libert� et justice et une union qui pourrait �tre et devrait �tre perfectionn�e sans cesse. Et cependant les mots sur le parchemin ne seront pas suffisants pour d�livrer les esclaves de leurs cha�nes, ni assurer aux hommes et aux femmes de toute couleur et de toute confession tous leurs droits et leurs devoirs de citoyen des Etats-Unis. Il faudra un long temps de g�n�rations successives d�Am�ricains qui d�siraient jouer leur r�le � par les protestations et les luttes, dans les rues et devant les tribunaux, au travers d�une guerre civile et par la d�sob�issance civile, et toujours au prix de grands risques, comblent le foss� entre les promesses de nos id�aux et la r�alit� de leurs temps.
Voil� un message puissant d�livr� devant une foule en d�lire. Alors, oui, il y a plusieurs �l�ments de la litt�rature contenus dans la politique.
Quand avez vous d�couvert votre conscience citoyenne ?
Il y a un moment pr�cis o� elle s�est impos�e : elle s�est �veill�e lors de l��t� 2004, avec la 38�me Convention Nationale R�publicaine qui s�installait � New-York. Il y avait des snipers post�s sur le toit du Madison Square Garden. Nous �tions en Irak depuis sept mois et plus de 100 000 opposants marchaient dans la rue pour protester contre la guerre en scandant, gueulant sur la circulation, se faisant arr�ter. J'observais les snipers et leurs gilets tactiques noirs, casqu�s et lourdement arm�s. M�me si les tireurs d��lites �taient probablement indispensables � la protection du pr�sident Bush et du parti r�publicain, cette image m�a n�anmoins sembl� troublante et loin de la politique. D�autant que le discours �tait tr�s limite car il faisait chanter les votants en agitant le drapeau d�un nouveau 11 Septembre. Ce fut � ce moment que ma conscience politique � pris racine.
Etes-vous optimiste pour l�avenir?
Je suis optimiste pour l�avenir mais sans �tre � un monsieur-je-sais-tout �. Je pense que plus les questions binaires seront pos�es, moins le d�bat sera int�ressant et plus sombre sera l�avenir.
Guerre � Harvard a une �trange r�sonance en France. Pensez-vous que les �lites du pouvoir sont les m�mes entre les pays ?
Je pense que la plupart du temps les diff�rences sont minces entre Fran�ais et Am�ricains tout comme entre Kenyans et Tha�landais ou quiconque d�ailleurs. M�me entre les pays pauvres et riches. Il y a une nuance, bien s�r, mais oui, les �lites du pouvoir sont similaires partout dans le monde.
Votre livre est travers� par la guerre en Irak. Comment la guerre a-t-elle marqu�e ces �lections ?
La crise �conomique a remplac� la guerre comme premier enjeu de la campagne. Et cette crise a mis un beau bordel parce que la vitesse avec laquelle la guerre a �t� � �cart�e � pour privil�gier l'�paisseur du portefeuille de l'Am�ricain moyen, est d�courageante. C�est un mauvais plan pour le pays.
Que pense la g�n�ration d�Harvard du livre ?
Sentiments mitig�s. Il n�a pas encore �t� publi� en anglais, donc seuls les gens de mon entourage l�ont lu et ils sont plut�t compr�hensifs. Je pense que la plus grosse critique - et elle est justifi�e - serait que peu d�attention a �t� port�e � l��gard de ceux qui s�int�ressaient r�ellement � la guerre. C�est mon seul v�ritable regret � propos. Pour une majorit� qui ne s'int�ressait pas � la guerre ou � la politique, il y avait une minorit� passionn�e qui s�y int�ressait r�ellement. En fait, je pense qu�il y avait moins de tension qu'ailleurs. C�est la raison pour laquelle j�y ai �crit. Avec le recul, j�aurais souhait� que ces personnes - ceux qui font la guerre - soient mieux repr�sent�es dans le livre. A pr�sent, elles risquent d��tre emmerd�es par sa sortie.
Maintenant, qu�allez-vous faire ? Continuer d��crire � ?
C�est encore flou. J��cris en ce moment sur les �lections, mais je suis aussi int�ress� par la politique �trang�re. Je continuerai toujours d��crire, mais j�aimerais un jour �tre impliqu� plus directement dans la politique. Propos recueillis par Charles Patin O'Coohoon
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