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Jessica Nelson et David Foenkinos: la cohabitation
Explorant � travers leurs romans Mesdames, souriez et
En cas de bonheur le th�me de la coexistence, Jessica
Nelson et David Foenkinos confirment du haut de leur jeune
�ge, que l'�dition aurait bien du mal � se passer d'eux. Entretien
� plumes tir�es...
Dans vos livres Mesdames, souriez � 1er roman � et
En cas de bonheur � 4e roman), l'existence du couple et
la cohabitation g�n�rationnelle semblent d�licates, voire
impossibles ?
Jessica L.Nelson : Certes, le huis clos de
Mesdames, souriez est un affrontement entre une tr�s jeune
femme et une bien plus �g�e qui se d�testent, sur fond de
canicule. Elles se disputent un territoire, un appartement sur
lequel elles ont les m�mes droits et que chacune veut
r�cup�rer. Mais, moins qu�un conflit de g�n�ration (m�me si la
diff�rence d��ge est un facteur �vident d�incompr�hension entre
les deux), il s�agit d�un roman sur la peur du d�clin, construit sur
un jeu de miroirs r�fl�chissants entre la jeune et l�ancienne.
L�une et l�autre se regardent, chiens de fa�ence camp�s sur les
extr�mit�s de la cha�ne de la vie ; l�une redoute ce qu�elle va
devenir, l�autre regrette ce qu�elle a �t�. On peut imaginer que ce
renvoi mutuel et quotidien devienne insoutenable� Ce roman
est l�histoire d�un jeune et d�un vieux couple, qui tente � la fois
de faire des concessions (sans parvenir � synchroniser, d�o� la
difficult�), et qui n�y croit plus, cependant.
David Foenkinos : Je suis sid�r� de voir � quel point tu
r�sumes bien ton livre ! L�existence du couple, apr�s du temps,
est forc�ment impossible. Surtout de nos jours, avec le
t�l�phone portable, et toutes les modernit�s techniques qui
n�ont pour seuls buts que de foutre en l�air les couples. Il faut
alors chercher des moyens de surmonter l�usure. Comme mon
livre est aussi un guide pratique pour couples en perditions, on
apprend des techniques de survie. Par exemple, il ne faut
jamais aller dans un restaurant italien. Et il faut bannir les
hamacs de nos vies.
On retrouve des situations impossibles et des quiproquos ;
il y a dans vos romans un potentiel (pas �rotique, David)
th��tral, les paires fonctionnent � merveille ?
J. N: Les paires fonctionnent � merveille sur le plan
romanesque et th��tral� parce que sur le plan personnel, ce
sont ces situations, ces rapports de personne � personne, qui
sont les plus tendus et donc les plus " caricaturables ", riches et
intenses sur le plan �motionnel. Et en effet, j�imagine bien
Louisa-Marie et sa " coloc� " sur les planches, incarn�es par
Jeanne Moreau et Sylvie Testud ; des portes qui claquent, des
pi�ges tendus, une tension qui grimpe proportionnellement � la
mont�e des temp�ratures�
D.F : Je trouve que le couple est le sujet le moins
int�ressant qui soit. Alors je voulais le traiter en jouant avec
beaucoup de clich�s. C�est pour �a qu�il y a des d�tectives
priv�s qui ont des liens familiaux, et que la femme tombe
amoureuse du d�tective priv� qu�elle a engag� pour suivre son
mari. C�est th��tral s�rement, mais les portes ne claquent pas,
puisque dans ce livre il y a toujours des femmes entre les
portes.
Les prix tombent en ce moment, le Goncourt pour celui
qu'on n�attendait plus... Qui aimeriez-vous r�compenser ?
J.N : Tu veux un palmar�s ? Bon, si j�avais �t�
Edmonde Charles-Roux, j�aurais donn� le Goncourt � David
Foenkinos bien entendu. Et puis je cr�erais un prix " nouvelle
g�n�ration " avec l�imaginatif Pascal Borie (Technikart), genre
Prix de Flore mais compos� de jur�s qui n�ont pas
d�accointances avec les maisons d��dition. Donc je n�y
si�gerais pas ; ce qui ne m�emp�cherait pas de souhaiter de
toutes mes forces que David l�ait aussi, histoire de se consoler
de son Goncourt, et de d�jeuner avec tous les membres du jury
pour les convaincre qu�il faut voter FOENKINOS.
D.F : Si seulement le monde litt�raire pouvait �tre
Jessica Nelson. Honn�tement, je n�ai pas assez lu de livres de
cette rentr�e. Il y a Martin Page, aussi, qui aurait �t� un fabuleux
Goncourt des Lyc�ens.
Devant la richesse de cette rentr�e litt�raire, quelles sont les
romans qui vous ont marqu�s (� part les v�tres) ... ?
J.N : Me trompai-je en affirmant que La possibilit�
d�une �le a marqu� TOUS les auteurs de cette rentr�e
litt�raire 2005 ? Sans pour autant l�avoir lu... Il y a les auteurs de
la maison Fayard, qui ont redout� l�ouragan ; les auteurs
confirm�s des maisons concurrentes, qui ont redout�
l�accaparement des m�dias ; les jeunes auteurs, qui redoutent
� peu pr�s tout. Ensuite, plusieurs romans m�ont bluff�e :
Nathalie Rheims pour son aisance � changer de registre dans
Le Cercle de Meggido chez L�o Scheer ; L�onora Miano
pour L�Int�rieur de la Nuit (Plon), un premier roman aux
ambiances africaines poignantes, qui traite, entre autres, de la
difficult� d�attribuer un contour pr�cis � la " barbarie " ; puis
C�cile Ladjali, qui a transpos� dans La Chapelle Ajax le
magnifique mythe du h�ros grec �ponyme. Et puis les lectures
de Vassili Alexakis, Takis Th�odoropoulos ou encore
d�Ormesson m�ont rendue dingue. Leur �l�gance et leur
ambition litt�raire me font r�ver.
D.F : Il y a Houellebecq et les autres. Et dans les autres
(que j�ai lus, bien s�r), je mets Quand j��tais dr�le de
Karine Tuil au premier plan.
Jessica, tu n'en as pas marre de lire encore un roman de
David sur le couple ?
J.N : Le jour o� j�en ai marre de lire David, je me
suicide. Parce que �a voudra dire une chose ou l�autre : que l�un
des auteurs les plus talentueux de sa g�n�ration s�est mis sans
me pr�venir � la retraite ; ou parce que j�aurais d�finitivement
perdu tout sens de l�humour. Les livres de David ne se r�p�tent
jamais. Si le couple est toujours une donn�e centrale de ses
romans, c�est un couple qui est regard� et mis en sc�ne � des
instants tr�s diff�rents de son �volution. Dans En cas de
bonheur par exemple, c�est le potentiel �rotique du monde
ext�rieur au couple qui est explor�
David, tu voudrais une veuve comme la dame de
Mesdames, souriez ?
D.F : Pas de probl�me. Avec moi, elle aurait �t� du miel.
J�ai l�exp�rience des vieilles dames, j�ai longtemps �t� serveur
dans un salon de th�. Des petits g�teaux pas trop secs � quatre
heures, et le tour est jou�.
J.N : Pardon d�interrompre � mais comment quelqu�un
qui a une veuve peut encore d�sirer en avoir une, puisque par
d�finition il s�agit d�un mort ? Et rassure-moi David, tu n�as pas
l�intention de te suicider avant ton 5e livre, tu sais, celui qui aura
le Goncourt ou la Next Generation ?
D.F : Mais ce n�est pas antinomique. Un suicide
faciliterait peut-�tre m�me le succ�s.
J.N : Si tu veux on organise �a alors� Un faux suicide et
une r�surrection�
Ca fait quoi d'avoir sa photo sur la couv� ou la quatri�me de
son roman ?
J.N: C�est la premi�re fois qu�on m�a demand� de faire
la gueule devant l�objectif, pour r�pondre aux besoins de la mise
en sc�ne du bandeau. Mais je ne me reconnais pas l�-dessus,
j�ai vraiment l�impression qu�il s�agit de Louisa-Marie � mon
h�ro�ne, qui n�est pas moi, ou qui est une partie de moi il y a
longtemps. Sinon, je soup�onne David d��tre venu chez
Flammarion uniquement pour enfin avoir son portrait de
serial-seducteur sur sa 4e de couverture. Chez Gallimard, pas
de photo�
D.F : Ah ! Tu soup�onnes mal, car je suis tellement plus
beau en vrai. Heureusement que le livre marche bien, sinon
j�aurais consid�r� la photo comme responsable.
Des projets pour la suite ?
J.N : Une nouvelle dans un recueil collectif � para�tre
chez Ramsay le 15 novembre, aux c�t�s de Gonzague St Bris,
Yves Simon, Serge Joncour, Thomas Bouvatier et
d�autres�dont David. On ne se quitte plus ! Et je travaille � mon
2e roman donc il ne faut pas m�inviter � d�ner en ce moment.
Comme j��cris entre minuit et trois ou quatre heures du mat�, j�ai
tendance � d�serter la table avant le dessert pour rentrer chez
moi pas trop tard.
D.F : La fin de pr�paration de mon premier court
m�trage, r�alis� avec mon fr�re. Il s�agit d�une histoire d�amour,
vue par les pieds. Et puis un livre qui est la version romanc�e
d�un fait divers. Et puis dormir, car je suis �puis�. Il y a trop de
lettres dans l�alphabet.
En cas de bonheur de David Foenkinos, �d Flammarion
Mesdames, souriez de Jessica Nelson, �d Fayard Propos recueillis par Charles Patin O'Coohoon
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