Eloge des for�ts depuis la vitre d'un wagon Richard Dalla Rosa
Arthur RIMBAUD, " Phrases " in Illuminations I Un jour j'irai rejoindre les for�ts. Loin des hommes et des villes, je courrai hors d'haleine. Il n'y aura ni
n�vrose ni psychose, juste une folie douce et lib�ratrice. Ma course deviendra vol, la pluie ma source, la terre mon repos. Je ne vivrai plus pour moi, mon identit� se m�lera � l'univers ; en me livrant je saurai qui je suis.
II Face aux for�ts, quelque chose m'�chappe. Quelque chose de ma vie, une part cach�e, mais bavarde, et chuchotante. Elle ne cesse de murmurer
depuis un recoin d'ombre, je distingue � peine son profil ; cette part semble parler seule, comme ces gens dans la rue qui articulent des mots pour eux-m�mes, � d�faut de trouver quelqu'un � qui se confier. Quelqu'un � qui se
confier, oui, � qui s'abandonner, � qui s'avouer. Avouer ses peurs, et ses d�sirs, avant que je ne m'�chappe. III Je regarde la for�t depuis la vitre du train,
et je la traverse, proche du r�ve. Le train roule comme la phrase qui m'emporte vers le point faussement final, toujours. L'arriv�e n'est qu'un d�part en sursis. J'aurai quitt� le paysage forestier, mais il m'attendra � la vitre
d'un autre wagon, jusqu'au jour o� les d�bris de verre signifieront ma fuite d�finitivement finale. IV V Seul le frottement m�tallique des roues contre les rails me rappelle � la r�alit� du narrateur fou. Le bruit est l�, pr�sent dans ce chuchotis bruissant de la part d'ombre, cach�e. Dansant dans ce chuchotis, la
gr�ce se m�le � la cruaut�, la voix du narrateur fou se fond dans mon �cho intime, des mots venus d'on ne sait o� se font entendre, ils s'insinuent dans le moindre espace cr�� par le silence, ces mots, toujours les m�mes, les
indociles, les indicibles. Nous les entendons sans pouvoir les prononcer. Des �nigmes effront�es, aux griffes plant�es dans notre chair, au port altier, � la t�te de Sphinx, voil� ces mots. Ils sont notre mort, notre mise � mort.
VI Ces mots, contre toute
attente, ne m'effraient plus. Ils sont r�tifs, qu'importe ? Qu'ils le restent. Qu'ils demeurent l�, dans leur gaine mis�rable et orgueilleuse. Car leur mis�re c�toie l'orgueil, tout comme la cruaut� embrasse la gr�ce. Leur
terreur conjugu�e ne me retient plus prisonnier. Leur double jeu ne m'�crase plus. Le contact de la peau me parle davantage, et me fait parler comme ce train qui m'emporte vers l'�me d�sir�e en un corps. |
|||||||||||||||||||||
|
|||||||||||||||||||||
|
|||||||||||||||||||||