Rencontre avec Poppy Z. Brite
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Pouvez-vous nous dire un mot au sujet de la réception de Plastic Jesus, livre original et plutôt inattendu du public américain ?
A vrai dire il n’y en a pas eu beaucoup ! Nous avions décidé que Plastic Jesus serait à tirage limité (seulement 2500 copies), et seule une petite presse spécialisée s’est occupée de la promo. Il est vrai que l’édition américaine s’intéresse aussi beaucoup moins aux ouvrages de ce type, plus confidentiel, plus court… et surtout très éloigné de la réalité ! Je ne peux nier cette évidence…
Et en ce qui concerne les biographes officiels des Beatles, ainsi que les membres de la famille de John Lennon ?
Je ne sais pas s’ils ont lu le livre, en tous cas cela m’étonnerait qu’ils se sentent offensés par les entorses à la vérité que j’ai délibérément choisi de commettre. Ce livre présente certainement quelques irrégularités, quelques maladresses ; mais j’ai fait mon travail avec beaucoup d’amour et de sincérité. Aucune malice là-dedans, aucune ambiguïté. Alors que j’ai en lu beaucoup dans le genre, au sujet des Beatles et de la vie de John Lennon…
Auriez-vous aimé que votre idole vous lise ?
Je crois qu’il aurait été ennuyé de voir que j’en faisais une star gay. Il aurait sans doute préféré lire un autre de mes livres, le concernant moins directement !
Avez-vous envoyé votre lire à Paul Mc Cartney ?
Non, je suis sûre qu’il a d’autres choses plus intéressantes à faire que de lire mes déconnades !
Fan des Beatles depuis...
1980, lorsque John a été assassiné. La couverture médiatique de cet événément a attiré mon attention, et je me suis intéressée à eux. Mais je ne suis pas une obsédée des Beatles, je vous rassure ! Plutôt fascinée par leurs parcours glorieux et somme toute exceptionnel.
Comment avez-vous eu l’idée d’écrire sur l’histoire des Beatles ? N’avez-vous pas eu peur de perdre votre public habituel ?
Vous savez, un auteur ne doit pas écrire en fonction d’un public, de son public. Si ce que j’écris plaît c’est tant mieux, mais j’écris avant tout pour une seule personne : moi-même. A l’audience de suivre… ou de ne pas suivre.
Le thème de l’homosexualité masculine est fréquemment abordé dans vos livres… vous vous sentez proche de Anne Rice ?
Alors là, pas du tout !!! Je la trouve très mauvaise, et son « voisinage » littéraire me dérange. S’il vous plaît, pas d’assimilation hâtive ! Et puis, pourquoi ne pas aborder l’homosexualité masculine ? Demandez-vous aux auteurs hétéros la raison pour laquelle ils mettent en scène des personnages hétéros ? Tout est sujet.
Vous faites de Paul Mc Carney l’élément stable du couple John-Paul.
Peyton (Paul Mc Cartney, ndt) est très stable, mais il est aussi le personnage qui manipule et le stratège de l’histoire – il ferait n’importe quoi pour que le groupe poursuive son ascension. Il me semblait que cela collait bien à la réalité…
En lisant Plastic Jesus, je n’ai pu m’empêcher de penser à l’une de vos nouvelles de Self Made Man. Elle parle de deux stars du rocks que seule la mort sépare…
Il est vrai que cette nouvelle pourrait être considérée comme un travail de préparation pour le roman. D’autre que vous m’en ont fait la remarque. Je n’irais pas si loin, même s’il est vrai que le portrait dressé des deux protagonistes est une ébauche des portraits de Seth et Peyton (John Lennon et Paul Mc Cartney, ndt).
Sauf que dans la nouvelle, les deux musiciens ne sont pas amants. Ils sont simplement confidents, et membres du même groupe. Mais je suppose que ce niveau de proximité est aussi un prélude à une autre forme d’intimité nettement plus sexuelle…
Vous vous êtes beaucoup documentée pour écrire Plastic Jesus ?
J’ai lu beaucoup de livres sur les Beatles bien entendu. Mais j’ai aussi laissé parler mon imagination, mes sentiments ; afin que Paul et John deviennent de vrais héros de roman. Il me semble avoir bien représenté la manière dont John était médiatisé : un peu comme un nouveau messie, avec toute l’ambivalence que cela représente… Il n’a jamais prétendu qu’il se croyait être un annonciateur divin, mais n’a-t-il pas dit qu’il « serait crucifié par le public » ?
Vous réussissez en tous cas à perdre le lecteur entre votre imaginaire et la réalité. ..
Je vais vous confier quelque chose, ça n'est certainement pas très "promo" mais bon. En fait, je suis assez mécontente de Plastic Jesus. Pour cette raison que vous pourrez trouver contradictoire : je trouve mon récit encore trop proche de la réalité. Et pour moi, cela représente un manque cruel d’imagination. J’avais plus d’ambition au départ, mais après deux ans de travail acharné là-dessus, et une centaine de pages achevées, j’ai dû revenir sur mes idées de départ. J’étais en fait dans une phase de transition littéraire lorsque j’ai écrit Plastic Jesus. Je n’étais plus satisfaite par mes histoires « d’horreur » habituelles, mais je ne savais pas vraiment ce vers quoi je devais me diriger. Et j’ai l’impression que ce livre a pâti de mes incertitudes…
Vous avez décidé de l’illustrer vous-même.
Mon éditeur chez Subterranean Press m’a demandé de le faire, et j’ai essayé. Je dessinais beaucoup lorsque j’étais à l’école, mais il faut croire que j’ai sacrément perdu la main ! Ici encore je ne suis pas satisfaite de mon travail…
En fait, à travers tout ce livre, il me semble être loin d’avoir tout donné de moi. J’avais imaginé plus de portraits de personnages, plus d’intrigues… et cela donne plutôt un « John and Paul go to the Stonewall Riots ». Mais c’est comme si le livre m’avait dépassée, et qu’il avait décidé d’être ainsi… pas comme je l’avais moi-même imaginé. D’ailleurs, c’est rarement le cas. Les auteurs s’aperçoivent souvent que l’écriture est plus forte et plus maligne qu’eux.
En tous cas je ne souhaite plus illustrer d’autres de mes livres, je ne me considère pas comme étant une artiste suffisamment bonne pour le faire. Même si quelques lecteurs m’ont dit qu’ils étaient contents d’avoir vu ma vision en image de mon propre travail avec les mots…
Lorsque vous avez écrit ce livre : de l’émotion ? De l’enthousiasme, de l’amusement ?
De l’émotion certainement, mais pas de joie. L’écriture est une pulsion chez moi, une forme de catharsis et c’est douloureux plutôt que joyeux.
Pouvez-vous parler de vos projets ?
Deux nouvelles intitulées The value of X et Liquor. Elles parleront de deux cuisiniers de la Nouvelle Orléans qui apprennent à monter un business. Cela sera encore très différent de ce que j’ai l’habitude d’écrire, autant pour le sujet que stylistiquement. Je suis assez contente de ce projet, en ce qu’il me permet de peindre la Nouvelle Orléans de manière beaucoup plus vraie et proche que ce que j’ai fait avant…
Jessica Nelson
Plastic Jesus
Poppy Z. Brite
Ed. Diable Vauvert
0 p / 0 €
ISBN:
A vrai dire il n’y en a pas eu beaucoup ! Nous avions décidé que Plastic Jesus serait à tirage limité (seulement 2500 copies), et seule une petite presse spécialisée s’est occupée de la promo. Il est vrai que l’édition américaine s’intéresse aussi beaucoup moins aux ouvrages de ce type, plus confidentiel, plus court… et surtout très éloigné de la réalité ! Je ne peux nier cette évidence…
Et en ce qui concerne les biographes officiels des Beatles, ainsi que les membres de la famille de John Lennon ?
Je ne sais pas s’ils ont lu le livre, en tous cas cela m’étonnerait qu’ils se sentent offensés par les entorses à la vérité que j’ai délibérément choisi de commettre. Ce livre présente certainement quelques irrégularités, quelques maladresses ; mais j’ai fait mon travail avec beaucoup d’amour et de sincérité. Aucune malice là-dedans, aucune ambiguïté. Alors que j’ai en lu beaucoup dans le genre, au sujet des Beatles et de la vie de John Lennon…
Auriez-vous aimé que votre idole vous lise ?
Je crois qu’il aurait été ennuyé de voir que j’en faisais une star gay. Il aurait sans doute préféré lire un autre de mes livres, le concernant moins directement !
Avez-vous envoyé votre lire à Paul Mc Cartney ?
Non, je suis sûre qu’il a d’autres choses plus intéressantes à faire que de lire mes déconnades !
Fan des Beatles depuis...
1980, lorsque John a été assassiné. La couverture médiatique de cet événément a attiré mon attention, et je me suis intéressée à eux. Mais je ne suis pas une obsédée des Beatles, je vous rassure ! Plutôt fascinée par leurs parcours glorieux et somme toute exceptionnel.
Comment avez-vous eu l’idée d’écrire sur l’histoire des Beatles ? N’avez-vous pas eu peur de perdre votre public habituel ?
Vous savez, un auteur ne doit pas écrire en fonction d’un public, de son public. Si ce que j’écris plaît c’est tant mieux, mais j’écris avant tout pour une seule personne : moi-même. A l’audience de suivre… ou de ne pas suivre.
Le thème de l’homosexualité masculine est fréquemment abordé dans vos livres… vous vous sentez proche de Anne Rice ?
Alors là, pas du tout !!! Je la trouve très mauvaise, et son « voisinage » littéraire me dérange. S’il vous plaît, pas d’assimilation hâtive ! Et puis, pourquoi ne pas aborder l’homosexualité masculine ? Demandez-vous aux auteurs hétéros la raison pour laquelle ils mettent en scène des personnages hétéros ? Tout est sujet.
Vous faites de Paul Mc Carney l’élément stable du couple John-Paul.
Peyton (Paul Mc Cartney, ndt) est très stable, mais il est aussi le personnage qui manipule et le stratège de l’histoire – il ferait n’importe quoi pour que le groupe poursuive son ascension. Il me semblait que cela collait bien à la réalité…
En lisant Plastic Jesus, je n’ai pu m’empêcher de penser à l’une de vos nouvelles de Self Made Man. Elle parle de deux stars du rocks que seule la mort sépare…
Il est vrai que cette nouvelle pourrait être considérée comme un travail de préparation pour le roman. D’autre que vous m’en ont fait la remarque. Je n’irais pas si loin, même s’il est vrai que le portrait dressé des deux protagonistes est une ébauche des portraits de Seth et Peyton (John Lennon et Paul Mc Cartney, ndt).
Sauf que dans la nouvelle, les deux musiciens ne sont pas amants. Ils sont simplement confidents, et membres du même groupe. Mais je suppose que ce niveau de proximité est aussi un prélude à une autre forme d’intimité nettement plus sexuelle…
Vous vous êtes beaucoup documentée pour écrire Plastic Jesus ?
J’ai lu beaucoup de livres sur les Beatles bien entendu. Mais j’ai aussi laissé parler mon imagination, mes sentiments ; afin que Paul et John deviennent de vrais héros de roman. Il me semble avoir bien représenté la manière dont John était médiatisé : un peu comme un nouveau messie, avec toute l’ambivalence que cela représente… Il n’a jamais prétendu qu’il se croyait être un annonciateur divin, mais n’a-t-il pas dit qu’il « serait crucifié par le public » ?
Vous réussissez en tous cas à perdre le lecteur entre votre imaginaire et la réalité. ..
Je vais vous confier quelque chose, ça n'est certainement pas très "promo" mais bon. En fait, je suis assez mécontente de Plastic Jesus. Pour cette raison que vous pourrez trouver contradictoire : je trouve mon récit encore trop proche de la réalité. Et pour moi, cela représente un manque cruel d’imagination. J’avais plus d’ambition au départ, mais après deux ans de travail acharné là-dessus, et une centaine de pages achevées, j’ai dû revenir sur mes idées de départ. J’étais en fait dans une phase de transition littéraire lorsque j’ai écrit Plastic Jesus. Je n’étais plus satisfaite par mes histoires « d’horreur » habituelles, mais je ne savais pas vraiment ce vers quoi je devais me diriger. Et j’ai l’impression que ce livre a pâti de mes incertitudes…
Vous avez décidé de l’illustrer vous-même.
Mon éditeur chez Subterranean Press m’a demandé de le faire, et j’ai essayé. Je dessinais beaucoup lorsque j’étais à l’école, mais il faut croire que j’ai sacrément perdu la main ! Ici encore je ne suis pas satisfaite de mon travail…
En fait, à travers tout ce livre, il me semble être loin d’avoir tout donné de moi. J’avais imaginé plus de portraits de personnages, plus d’intrigues… et cela donne plutôt un « John and Paul go to the Stonewall Riots ». Mais c’est comme si le livre m’avait dépassée, et qu’il avait décidé d’être ainsi… pas comme je l’avais moi-même imaginé. D’ailleurs, c’est rarement le cas. Les auteurs s’aperçoivent souvent que l’écriture est plus forte et plus maligne qu’eux.
En tous cas je ne souhaite plus illustrer d’autres de mes livres, je ne me considère pas comme étant une artiste suffisamment bonne pour le faire. Même si quelques lecteurs m’ont dit qu’ils étaient contents d’avoir vu ma vision en image de mon propre travail avec les mots…
Lorsque vous avez écrit ce livre : de l’émotion ? De l’enthousiasme, de l’amusement ?
De l’émotion certainement, mais pas de joie. L’écriture est une pulsion chez moi, une forme de catharsis et c’est douloureux plutôt que joyeux.
Pouvez-vous parler de vos projets ?
Deux nouvelles intitulées The value of X et Liquor. Elles parleront de deux cuisiniers de la Nouvelle Orléans qui apprennent à monter un business. Cela sera encore très différent de ce que j’ai l’habitude d’écrire, autant pour le sujet que stylistiquement. Je suis assez contente de ce projet, en ce qu’il me permet de peindre la Nouvelle Orléans de manière beaucoup plus vraie et proche que ce que j’ai fait avant…
Jessica Nelson
Plastic Jesus
Poppy Z. Brite
Ed. Diable Vauvert
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Last modified onlundi, 11 mai 2009 22:08
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