Ego-surf
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Surf sur l'année 2000.
Un énième Journal, le passage à l'an 2000, aphorismes nés d'une année d'événements d'envergure variable, rétrospective allusive d'un siècle. L'ensemble aurait pu s'avérer on ne peut plus banal, mais pourtant à aucun moment les ingrédients qui le composent ne buggent.
Confession : "Ce Journal m'a été commandé en juillet 1999 par l'éditeur Marc Grinsztajn, pour le compte de l'éditeur Calmann-Lévy". Se dit naïvement touché qu'on ait pensé à lui pour cette main courante : si l'exercice est parfois jubilatoire, il se découvre plus naïf qu'il ne le pensait de prime abord. Bien ennuyé par la nécessité d'écrire 365 jours d'affilée ! Si bien qu'il nous sert quelques passages exquis de décalage "Mon problème, tu vois, c'est de n'être ni dedans ni dehors, toujours le cul entre deux chaises, au cœur d'un atermoiement". L'atermoiement n'est cependant pas si perceptible que Viviant prétend le déplorer, et ce Journal enchaîne tout ce dont il souhaitait nous entretenir. Des trivialités des prix littéraires au drame de l'expérience Kosovare, même s'il n'y perd pas, ainsi qu'on le lui avait prédit, dix ans de son existence. Entremêlements pas si confus que ça au beau milieu d'une revue de presse dont l'agencement permet une catégorisation pleine de pertinence.
Qu'on en juge. "Finalement, il y aura eu, en l'an 2000, 4 grands types d'événements : 1, la victoire de la science : clonage, greffes, séquençage des génomes. 2, la défaite de la politique : affaires, mises en examen, élections américaines. 3, la victoire de la nouvelle économie : start-up, stock-option, fusions, concentrations, OPA, Nasdaq. 4, la défaite de la vieille économie : vache folle, effet de serre, catastrophes maritimes, ferroviaires et routières. Autrement dit : un mariage (celui de la science folle avec le capitalisme, dit second ou régénéré) et deux enterrements (celui du capitalisme premier puis de sa vieille veuve, la politique)".
Arnaud Viviant reprend sa plume que l'on sait caustique, aiguë, et grinçante, pour nous offrir sans prétention un recueil de pensées et de témoignages à distance. Apesanteur du propos, qui est à la fois distrayant et éloigné de toute forme de Carnet intime traditionnel. Car Ego surf réinvente bel et bien une forme d'écriture des Journaux : prévenus du nombrilisme qu'on ne peut manquer de rencontrer dans ce genre de littérature, l'inintimisme de l'ensemble, ponctué il est vrai de Moi Je toujours sarcastiques, nous entraîne dans des réflexions singulièrement personnelles au cœur desquelles le lecteur retrouve toujours sa place.
Quasiment un espace qui invite à l'expression, mais cette sensation est sans aucun doute due au flirt qu'entretient Viviant avec son interlocuteur, au badinage qui entoure ses propos, au sérieux dont il fait preuve en parlant de son derrière. Rarement du côté face : pas de mise en scène, ou alors seulement quelques promptes apparitions figuratives. Et pourtant sa présence est indéniable. Percutante, vivifiante, qui ne mâche pas ses mots surtout lorsqu'il s'agit de dénoncer les travers d'un art qui lui est cher : "à la fin de ce siècle, la littérature est un hobby. Seule sa médiocrité est suffisamment rentable". Ce qui est sûr, c'est que ce Journal n'a pas constitué un hobby pour Viviant, et que, s'il n'est en rien un chef d'œuvre littéraire - d'ailleurs le critique n'y prétend à aucun moment - il s'est préservé de toute forme de médiocrité. Reste à savoir s'il se classe parmi les réformistes ou les révolutionnaires.
Jessica Nelson
Ego-surf
Arnaud Viviant
Ed. Calmann-Lévy
224 p / 15 €
ISBN: 2702131700
Un énième Journal, le passage à l'an 2000, aphorismes nés d'une année d'événements d'envergure variable, rétrospective allusive d'un siècle. L'ensemble aurait pu s'avérer on ne peut plus banal, mais pourtant à aucun moment les ingrédients qui le composent ne buggent.
Confession : "Ce Journal m'a été commandé en juillet 1999 par l'éditeur Marc Grinsztajn, pour le compte de l'éditeur Calmann-Lévy". Se dit naïvement touché qu'on ait pensé à lui pour cette main courante : si l'exercice est parfois jubilatoire, il se découvre plus naïf qu'il ne le pensait de prime abord. Bien ennuyé par la nécessité d'écrire 365 jours d'affilée ! Si bien qu'il nous sert quelques passages exquis de décalage "Mon problème, tu vois, c'est de n'être ni dedans ni dehors, toujours le cul entre deux chaises, au cœur d'un atermoiement". L'atermoiement n'est cependant pas si perceptible que Viviant prétend le déplorer, et ce Journal enchaîne tout ce dont il souhaitait nous entretenir. Des trivialités des prix littéraires au drame de l'expérience Kosovare, même s'il n'y perd pas, ainsi qu'on le lui avait prédit, dix ans de son existence. Entremêlements pas si confus que ça au beau milieu d'une revue de presse dont l'agencement permet une catégorisation pleine de pertinence.
Qu'on en juge. "Finalement, il y aura eu, en l'an 2000, 4 grands types d'événements : 1, la victoire de la science : clonage, greffes, séquençage des génomes. 2, la défaite de la politique : affaires, mises en examen, élections américaines. 3, la victoire de la nouvelle économie : start-up, stock-option, fusions, concentrations, OPA, Nasdaq. 4, la défaite de la vieille économie : vache folle, effet de serre, catastrophes maritimes, ferroviaires et routières. Autrement dit : un mariage (celui de la science folle avec le capitalisme, dit second ou régénéré) et deux enterrements (celui du capitalisme premier puis de sa vieille veuve, la politique)".
Arnaud Viviant reprend sa plume que l'on sait caustique, aiguë, et grinçante, pour nous offrir sans prétention un recueil de pensées et de témoignages à distance. Apesanteur du propos, qui est à la fois distrayant et éloigné de toute forme de Carnet intime traditionnel. Car Ego surf réinvente bel et bien une forme d'écriture des Journaux : prévenus du nombrilisme qu'on ne peut manquer de rencontrer dans ce genre de littérature, l'inintimisme de l'ensemble, ponctué il est vrai de Moi Je toujours sarcastiques, nous entraîne dans des réflexions singulièrement personnelles au cœur desquelles le lecteur retrouve toujours sa place.
Quasiment un espace qui invite à l'expression, mais cette sensation est sans aucun doute due au flirt qu'entretient Viviant avec son interlocuteur, au badinage qui entoure ses propos, au sérieux dont il fait preuve en parlant de son derrière. Rarement du côté face : pas de mise en scène, ou alors seulement quelques promptes apparitions figuratives. Et pourtant sa présence est indéniable. Percutante, vivifiante, qui ne mâche pas ses mots surtout lorsqu'il s'agit de dénoncer les travers d'un art qui lui est cher : "à la fin de ce siècle, la littérature est un hobby. Seule sa médiocrité est suffisamment rentable". Ce qui est sûr, c'est que ce Journal n'a pas constitué un hobby pour Viviant, et que, s'il n'est en rien un chef d'œuvre littéraire - d'ailleurs le critique n'y prétend à aucun moment - il s'est préservé de toute forme de médiocrité. Reste à savoir s'il se classe parmi les réformistes ou les révolutionnaires.
Jessica Nelson
Ego-surf
Arnaud Viviant
Ed. Calmann-Lévy
224 p / 15 €
ISBN: 2702131700
Last modified ondimanche, 28 août 2011 19:39
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