Les Brèves
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14 Mar 2010 |
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Dans son deuxième roman, Jakuta Alikavazovic crée un décor-univers toujours à la limite de l'imaginaire et de la réalité, convoque fiction et réalité en s'attachant à donner voix à des êtres qui peinent parfois à affirmer une présence spectrale. Elle était pourtant réellement là un lundi soir dans un café près de Bastille, à Paris en France. Portrait. La quatrième de couv'
" Une jeune femme, blonde depuis peu, entre au Londres-Louxor. Dans cet ancien cinéma des années 20 se retrouve la diaspora bosniaque de Paris. On y parle peu de la guerre, davantage d’affaires, et beaucoup des soeurs Vitch : Ariana et Esme. En 1992, sur l’injonction parentale, elles ont rejoint un oncle installé à Paris depuis plusieurs années. Quinze ans plus tard, Ariana est comptable, Esme est écrivain. L’une séduit les hommes, l’autre les comprend. Elles font partie des habitués du Londres-Louxor, mais, ces derniers temps, on y croise surtout Esme, à la recherche de son aînée partie sans explications. Cette disparition émeut la communauté entière et pousse chacun à abattre ses cartes dans un jeu déroutant : l’évocation d’un pays d’origine dont l’histoire s’est éparpillée au fil de versions multiples ou dégradées, de fragments et de mythes."
Une jeune femme, blonde depuis peu, entre au Londres-Louxor. Dans cet ancien cinéma des années 20 se retrouve la diaspora bosniaque de Paris. On y parle peu de la guerre, davantage d’affaires, et beaucoup des soeurs Vitch : Ariana et Esme. En 1992, sur l’injonction parentale, elles ont rejoint un oncle installé à Paris depuis plusieurs années. Quinze ans plus tard, Ariana est comptable, Esme est écrivain. L’une séduit les hommes, l’autre les comprend. Elles font partie des habitués du Londres-Louxor, mais, ces derniers temps, on y croise surtout Esme, à la recherche de son aînée partie sans explications. Cette disparition émeut la communauté entière et pousse chacun à abattre ses cartes dans un jeu déroutant : l’évocation d’un pays d’origine dont l’histoire s’est éparpillée au fil de versions multiples ou dégradées, de fragments et de mythe
Une jeune femme, blonde depuis peu, entre au Londres-Louxor. Dans cet ancien cinéma des années 20 se retrouve la diaspora bosniaque de Paris. On y parle peu de la guerre, davantage d’affaires, et beaucoup des soeurs Vitch : Ariana et Esme. En 1992, sur l’injonction parentale, elles ont rejoint un oncle installé à Paris depuis plusieurs années. Quinze ans plus tard, Ariana est comptable, Esme est écrivain. L’une séduit les hommes, l’autre les comprend. Elles font partie des habitués du Londres-Louxor, mais, ces derniers temps, on y croise surtout Esme, à la recherche de son aînée partie sans explications. Cette disparition émeut la communauté entière et pousse chacun à abattre ses cartes dans un jeu déroutant : l’évocation d’un pays d’origine dont l’histoire s’est éparpillée au fil de versions multiples ou dégradées, de fragments et de mythes.Pour Jakuta Alikavazovic, un livre se conçoit un peu comme un immeuble : on en fait le plan, on l’échafaude, il se construit et grandit au fil du temps. Ce qui tombe plutôt bien puisque Le Londres-Louxor, son nouveau roman, s’articule autour d’un lieu à l’architecture mythique : ancien cinéma à l’architecture "égyptisante" construit à Paris dans les années 1920, qui aurait servi de refuge aux immigrés croates ayant fui leur pays lors du conflit dans les années 90. L’ambiguïté quant à la véritable existence de ce lieu persiste au fil de la lecture et illustre à merveille la circulation permanente entre la fiction et le réel qui caractérise l’œuvre... voire même la personnalité de Jakuta.
Qu’on ne s’attende pas à entamer la lecture d’un récit de l’exil ou un témoignage factuel sur les meurtrissures du déracinement. Le questionnement est certes présent en filigrane. Mais ce que sonde et exprime Jakuta a plus à voir avec les traces, les ombres – elle dit elle-même avoir l’impression que tous ses livres pourraient être lus comme des histoires de fantômes – les « écarts » et une certaine forme d’oubli qui, sans être radical, peut permettre d’avancer. Un peu à l’image du processus d’écriture qu’elle explique : beaucoup de recherches et de documentations dont elle ne conserve au final que de grandes lignes ou quelques anecdotes, pour nourrir un récit aussi contemporain qu’onirique et surréaliste par moments.
L’art et la manière Côté agenda, la quadrilingue Jakuta partage ses journées entre l’enseignement de l’anglais et l’écriture. Un emploi du temps astreignant qui l’oblige à beaucoup de sérieux mais surtout à faire preuve d’un certain recul par rapport à un milieu littéraire qui l’a très vite adopté. Preuve de cette curiosité : la communication, les passerelles entre les arts. Elle leur accorde une place non négligeable dans son roman. Sont ainsi successivement convoqués l’architecture bien sûr, qui lui offre un cadre et une structure mais aussi la peinture, à travers le vol de tableaux de la fondation Bührle. Le cinéma évidemment, puisque le lieu de son nouveau roman en est un, tout comme certains de ses personnages directement et ouvertement inspirés des héroïnes blondes et mystérieuses d’Hitchcock par exemple. On découvrira avec amusement la version Barbie de l’héroïne hitchcockienne. Et la littérature sous toutes ses formes. Louxor, j'adore Dégagé de toutes obligations, l’enjeu pour Jakuta est donc plus ludique que critique. Et elle n’en est pas à son coup d’essai: deux livres pour la jeunesse à l’Ecole des loisirs en 2004 avant un recueil de nouvelles, Histoires contre nature (2006) et Corps volatils, en 2008, pour lequel elle a obtenu le prix Goncourt du premier roman. En parallèle, elle collabore à différents projets artistiques, aussi bien théâtraux que plastiques en plus de l’anglais qu’elle enseigne. La maison Jakuta n’est donc pas près de s’effondrer puisqu’elle a déjà en tête de nombreuses extensions. Elle travaille ainsi à un grand œuvre autour de l’effet Meissner, principe physique qui a établit la disparition du champ magnétique dans certaines conditions. Où l’on soupçonne qu’il sera encore certainement question de corporalité, d’équilibre, de la façon dont on peut trouver sa place dans le monde… Le Londres-Louxor a un moment été pensé comme une aile de ce bâtiment. Peut-être ne sera-t-il qu’une annexe. Elle y réfléchit encore. Nous l’attendons avec curiosité. Laurence Bourgeon
Photo Nicolas Wintrebert
Le Londres-Louxor
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