4 Décembre 2006

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Bye Bye Poup�es


Un ami commun, journaliste, insiste pour qu�elles se rencontrent. Le rendez-vous a lieu. A l��poque, Virginie Despentes et Nora Hamdi accumulent les petits boulots. Au centre de tri postal, pr�s du Louvres, Virginie bosse la nuit et rentre � pied � pas l��nergie d�attendre le premier m�tro. Et Nora, serveuse dans une cr�perie, en conna�t d�j� un rayon sur la nuit pour avoir travaill� comme vestiaire en bo�te, � 17 ans. Filles des ann�es 80, leur voix est joyeuse, surtout lorsqu�il s�agit d��voquer ces ann�es o�, artistiquement, � tout s�est pass� �. Les genres musicaux se d�cloisonnent. En 89-90, Nora, plus � funky rap �, sort o� � tout le monde sort, pour aller voir du monde, participer au rassemblement � tandis que Virginie, puisqu�il faut parler musique, d�clare qu�elle � n�aurait jamais pu vivre sans. C�est mon lien avec la vie. La musique a particip� � ma construction sociale, de l�adolescence � l��ge adulte. �

La musique semblait avoir tout pris. Comment en �tes-vous arriv�es � l��criture ?

Nora Hamdi : L��criture a �t� une mise en danger. Elle est venue spontan�ment. J�avais envie d�y acc�der. J�ai commenc� par jeter une couleur, comme en peinture.
Virginie Despentes : Pour la musique ou l��criture, c�est toujours la m�me question : collaborer ou non. Nora, elle, parle de sujets dont on ne parle pas traditionnellement. Et parce qu�elle n�avait pas acc�s � la parole �crite, d'embl�e, �crire �tait d�j� une transgression. Aujourd�hui, elle assume, mais c�est vraiment r�cent.

En regardant vos personnages f�minins �voluer, de livres en livres, on se dit qu�il leur restera toujours une dose de violence. Est-ce d�lib�r� ? Est-ce oblig� ?

N.H. : La violence envers les femmes fait partie des premi�res images qui j�ai connues. Que les femmes doivent �tre violentes, non ! Mais c�est le constat. C�est d�apr�s ce que je vois, ce que j�entends.
V.D. : Il n�y a pas de n�cessit� dramatique l�-dedans. Les femmes, �a ramasse. Toujours. Elles se font bais�es, attaqu�es. M�me dans les classes qu�on croirait prot�g�es, les femmes en prennent plein la gueule. C�est simplement difficile de raconter autre chose. M�me si dans les ann�es 80 on a cru que �allait �tre cool.
N.H. : Il n�y a vraiment pas de fronti�re sociale dans la violence. Tu vas dans le show-biz et tu trouveras des vieux se choper des filles de 15 ans.
V.D. : Il n'y a pas de fronti�res. Mais quand t�es pauvre, le truc, c�est que tu ramasses deux fois plus. Dans les milieux ais�s, t�as au moins une chance de te faufiler.

Parmi celles qui se sont "faufil�es", quelle femme vous vient � l�esprit ? Y en a-t-il pr�cis�ment, que vous admirez ?

N.H. : Simone Weil, �videmment. Puis j�ai �t� tr�s marqu�e par les premiers �crits de Duras. Voil� une fille qui ne pleure pas�
V.D. : En g�n�ral, je suis frapp�e par les romanci�res, quand elles n�ont pas le choix, qu�elles sont trop d�munies. D�ailleurs, quand tu regardes, si elles r�ussissent et qu�elles sont mari�es, 9 fois sur 10 elles divorcent. Christine Angot, par exemple, elle te fait trop comprendre qu�elle n�a pas le choix. Elle continue d��tre l� o� on ne lui a pas demand� d'�tre. Dans son dernier bouquin, Une partie du c�ur, il y a des fulgurances incroyables.
N.H. : J�ai bien envie de le lire�

Christine Angot a ce point commun avec vous, c�est qu�on a souvent pris ses livres pour du t�moignage�

N.H. : Oui. On a tendance � boycotter tout ce qui n�est pas du t�moignage, ou bien � ramener la litt�rature � quelque chose qu�elle n�est pas. Quand le livre est fait, les m�dias y voient que ce qu�ils veulent y voir et c�est clair que j�ai pas envie de passer dans �a se discute, m�me si �a fait vendre.

Vous arr�tez la drogue, vous refusez les compromis� Vous cherchez la puret� ?

N.H. : Oui, non� la question n�est pas de chercher la puret�, mais de savoir ce que l�on veut en faire. Voil�, finalement les questions que je me pose, c�est plus de savoir o� j�avance, dans quoi je me projette ou qu�est-ce que je peux avoir en moi de sympathique !
V.D. : Le fait que j�aie arr�t� la drogue n�a pas de rapport avec la puret�. Si je l�ai fait, c�est pour l��criture. Je veux aller plus loin. La drogue englue la pens�e. Et en plus, quand tu vieillis� Quand tu regardes nos vieux, ils font pas leur boulot. On manque de quinquas, de sexag�naires. Je veux vieillir et continuer � chercher. La puret�, je sais pas. Je saurais plus tard ce que je fais maintenant. Mais franchement, un type comme Sollers, c'est nul. Il avait autre chose � d�livrer au monde.
N.H. : ...faudrait que je fasse de la philo. Faut que tu me tra�nes avec Medhi [Belhaj Kacem, �crivain-philosophe, ami de Virginie].
V.D. : Ouais ! Quelques cours sur la pornographie� Tu feras la fille qui pose des questions.
N.H. : Ah oui, �a, c�est une de nos diff�rences. Virginie a compl�tement int�gr� le sujet alors que j�ai du mal � regarder un film porno. C�est pas une question de corps mais plut�t de ce qu�il y a derri�re. Alors que Baise-moi, je consid�re �a comme un vrai film.

Vous confrontez souvent vos points de vue l�-dessus ?

V.D. : On en parle.
N.H. : Si j�ai �t� attir�e par toi, c�est pour �a, aussi. Avec toi j�y acc�de naturellement. Il n�y a aucun voyeurisme� mais beaucoup de compr�hension.
V.D. : �a m�int�resse d�en parler avec elle. Je sais pas, elle a comme un bon sens qui me ram�ne � des questions que je ne me serais pas pos�es.

Une derni�re question sur les lieux que vos romans investissent (Nancy, pour Bye Bye Blondie ou la banlieue pour Des poup�es et des anges). Ils font partie, souvent, des p�riph�ries alors que vous habitez toutes deux Paris, comme si vous ne pouviez pas vous d�faire des endroits o� vous avez grandies...

N.H. : J'habitais une maison derri�re une cit�, vers Choisy, Pantin. Ce sont des lieux de solitude. Des sortes de vide qu'on n'oublie pas. On avance avec son histoire, c'est tout. Et �a permet d'aborder des personnages dont on n'a pas l'habitude. Dans Plaqu� Or, mon prochain roman, je parle d'une banlieusarde qui n'acc�de pas � la sexualit� avec plaisir. Elle se cherche. Elle ne comprend pas la perception que l'on a d'elle.
V.D. : ... c'est un arch�type que l'on ne conna�t pas encore. Mais sinon, en province, c'est vrai que la vie de groupe est plus �panouie. Les gens ont des apparts, du temps, des voitures pour se voir. C'est plus chaleureux. Paris est plus violent. Il n'y a rien � partager donc les gens partagent moins. Depuis que j'habite ici je n'h�berge plus personne tout simplement parce que mon appart est trop petit. Mais bon, en m�me temps, c'est la plus belle ville du monde. Je ne peux plus en partir. Alors j'hurle moins de ma fen�tre.
N.H. : Je suis trop contente que t'habites le quartier...
V.D. : C'est toi qui m'a fait d�couvrir le Marais ! En fait, au d�but je croyais que c'�tait un quartier de tapettes... Je te remercierai jamais assez.

C'est bien, un nouvel appart, �a donne envie de faire un enfant.

N.H. : Ah ouais.
V.D. : Angot m'a vachement donn� envie.



Propos recueillis par Charles Patin O'Coohoon et Ariel Kenig.

Derniers livres parus :
Bye Bye Blondie
, Virginie Despentes (Grasset)
Des poup�es et des anges, Nora Hamdi (Diable Vauvert).

A para�tre en mars 2005 :
Plaqu� Or
, Nora Hamdi (Diable Vauvert)

Collaborations :

Trois �toiles
(bande dessin�e, Diable Vauvert)
Mordre au travers, Virginie Despentes (nouvelles) - illustration Nora Hamdi (Librio)

Propos recueillis par


Trois �toiles : interview de Nora Hamdi...

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