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Une partie du coeur
| | Une partie du coeur Christine Angot Stock
| Prix éditeur 10.00 euros
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On raconte beaucoup de choses sur Christine Angot. N�e en 1959 � Ch�teauroux, m�re d�une petite L�onore, on sait qu�elle fut un temps la compagne du journaliste litt�raire Pierre-Louis Rosyn�s, qu�elle s�est d�fendue de faire de l�autofiction durant quinze ans et que d�sormais son nom, parce qu�il signifie quelque chose, s�adjectivise (un roman a le droit d��tre Angotien ou de ne pas l��tre). Quoi d�autre ? Son dernier ouvrage, Les D�sax�s, mettait en sc�ne un couple de cin�astes en panne d��nergie. Encore ? Deux mois apr�s la publication de son dernier bout de litt�rature, elle rempile et signe Une partie du c�ur. Un court texte entre l'essai, la nouvelle et le journal. Un court texte Angotien.
Prologue
En d�but d�ann�e, dans un recueil de r�cits critiques intitul� Je vous �cris (P.O.L.), l��crivain-chroniqueur Mathieu Lindon posait la question : � Qui aurait pu s�attendre � Sujet Angot apr�s Les Autres, � L�Inceste apr�s Sujet Angot, � Quitter la ville apr�s L�Inceste et � Pourquoi le Br�sil ? apr�s Quitter la ville ? � Cette fois encore, qui pouvait s�attendre � cette Partie du c�ur apr�s le bon �cho de ses D�sax�s ? Sa rage avait de quoi se tarir. On n'�tait pas loin de penser que "on" l'avait enfin compris. Certes, on s'�tonnait qu�elle fasse autre chose que de l�autofiction (comme si elle en avait d�j� fait). Certes, on lui reprochait sa couverture, une photo de Jean-Baptiste Mondino (comme si aucun autre �crivain n�y flanquait sa gueule). Certes, comme � chaque nouveau livre, on lui en avait envoy� dans la face. Les critiques et les sarcasmes revenaient. Moins qu'avant, pensait-on. Mais non. Des insultes l'avaient encore touch�e. Elle avait de quoi faire un nouveau livre qu'elle ne tarderait pas � nous renvoyer dans la face.
La pr�carit� de son �nergie nous emp�chait de croire � la parution de cette Partie du c�ur. Mais ce qu�on oubliait, c'�tait le ras-le-bol d�un �crivain qui en a trop vu, trop lu et trop fait, et qui, m�me s'il menace de ne plus rien �crire, puise dans ses derni�res forces, chaque fois, pour revenir. R��crire. Goutte d'encre qui suffit � faire d�border la cartouche, le couple de r�alisateurs Beno�t Jacquot et Sophie Filli�res se reconnaissaient dans les D�sax�s au point de se d�clarer usurp�s par la m�chante Christine pour que Christine trouve mati�re � faire un livre. C'�tait tant pis pour eux. Et tant mieux pour elle. Pour nous.
Sc�nario
Puisque le prologue �tait l�, l�histoire pouvait commencer. Dans un caf� parisien, Christine Angot prend des verres en compagnie de J�r�me Beaujour (sc�nariste du susnomm� Beno�t Jacquot pour La Fille seule, Le Septi�me Ciel et Pas de scandale). � Moi, �coeur�e que les gens s�invitent dans mon livre, en se disant Untel c�est moi, elle c�est elle, et se permettent quand j��crivais en Je, de dire que je parlais de moi au sens � ma petite personne �, � moi, je �. Non seulement j��tais �coeur�e mais je ne comprenais pas surtout. � Au fur et � mesure de leurs rendez-vous, Angot cherche des r�ponses � ses questions. Pourquoi � Quand des romans remettaient le couvert avec Je est un autre, �a �nervait la soci�t� � ? Pourquoi � Je est un autre c'�tait l�interdit de l�inceste � ? Pourquoi les pr�suppos�s de la fiction s��vaporent dans la pratique ? Pendant ce temps, J�r�me tourne autour d�elle, la pousse dans ses retranchements, la contredit ou la soutient, apportant ainsi la dose qu�il faut de logique dans l�argumentaire Angotien qui finira, bien s�r, par servir la soupe Angotienne. On ne lui reprochera pas de ne pas �tre coh�rente : � force de tirer la couverture, J�r�me a froid, avec � l�air d�en avoir marre �. Mais ils reprennent, ils iront au bout en racontant leur vie � � condition, � condition seulement, que ces r�cits enseignent quelque chose sur l�aventure de l��tre humain dans la litt�rature �. Rien que �a.
La vie d�Angot
Mais quelle vie reste-t-il � raconter quand on a tout dit de son inceste, de ses amis, de ses enfants, de son �nergie et du temps qu�il fait ? Que reste-t-il � raconter quand on n�a � plus que la litt�rature et le th��tre � ? Et bien on raconte la litt�rature ou le th��tre. Et que fait-on quand on a racont� �a ? Et bien on pleure. � Dans la litt�rature c�est une partie du c�ur qui s�en va sculpter le livre. � On pleure et l�on regarde partir un bout de son c�ur. Christine Angot toujours plus loin. Toujours plus grand. Toujours plus beau.
Ariel Kenig
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