Écrivains de tous les pays, rassemblez-vous !
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AIR : Un nouvel acronyme dans le paysage de l’actualité littéraire française qui devrait rapidement faire date. Les Assises Internationales du Roman se sont déroulées, pour la deuxième fois, à Lyon, à l’initiative de la Villa Gillet et du journal Le Monde. Une semaine de rencontres, de débats et de tables rondes autour du thème : « Le roman, quelle invention ! ». Titre aussi large qu’ouvert qui a permis de regrouper les auteurs invités autour de thèmes plus précis : « Pourquoi tant d’amour ? », « La fissure géographique », « Trouver sa langue, sa place », « Le roman puzzle », « Les écrivains cinéastes », « Le roman de formation » ou encore « Tabou et transgression ». D’un genre nouveau, ces Assises ne sont ni un Salon du livre ni un festival lambda, mais un lieu de rencontres, de découvertes, de réflexion et de dialogue autour de la matière littéraire d’un point de vue mondial. L’occasion de venir écouter des auteurs de tous les horizons et de tous les continents. Le principe ? Une ou deux rencontres chaque soir de semaine et quatre ou cinq pendant le weekend. S’y greffent également des débats, des lectures et des entretiens, dont un avec Carlo Ginzburg, historien spécialiste de la « micro-histoire », invité d’honneur de cette édition.
Au-delà de sa présence, chaque auteur invité a été mis à contribution en amont puisqu’il lui a été demandé de rédiger un texte en rapport avec le thème auquel il est associé. Il en fait lui-même la lecture avant que ne s’ouvre la discussion avec les autres écrivains, orchestrée par des journalistes français et étrangers. Mais le véritable point fort de ces assises tient dans la place accordée aux questions du public. C’est lorsque le micro circule sous la grande verrière des Subsistances - ancien couvent et ancienne caserne militaire reconvertie en lieu culturel - que la parole est réellement décloisonnée, plus libre et spontanée.
Durant cette semaine, il a donc essentiellement été question du romanesque, de la fiction et de ses limites, mais aussi inévitablement de politique. Politique en général dès lors qu’il y a confrontation de cultures et d’histoires différentes et selon que la fiction qui en découle est produite dans un contexte de censure ou de liberté totale. Ainsi, rien à voir entre Duong Thu Huong, Rafael Chirbes et Aleksandar Hemon d’une part - tous trois ayant connu des régimes répressifs en Corée, en Espagne et en ex-Yougoslavie - et Arthur Japin, dont le rapport à l’Histoire est forcément plus apaisé. Politique du livre également puisque la table ronde du samedi matin, consacrée à la circulation internationale des œuvres, coïncidait avec la remise en question récente de la loi Lang sur le prix unique et l’interdiction qu’elle impose de ne pas brader les livres au-delà de 5 % du prix de vente pendant les deux années qui suivent leur mise en vente. L’occasion pour les éditeurs français présents de réaffirmer l’importance de cette spécificité française et de réitérer leur soutien au réseau de libraires indépendants ; et pour les éditeurs étrangers, de corroborer leurs dires en témoignant de la déliquescence de la diversité des librairies et du conseil personnalisé.
Le roman n’est donc pas mort. Sa diversité semblerait même attester de son caractère fédérateur. Par delà les frontières, le roman est lu et écrit avec la même passion. C’est dans cette confrontation et ces mises en perspective qu’apparaissent des résonances ou se font écho de superbes voix. Rien ne pouvait mieux en témoigner que la lecture qui a clôturé cette semaine de débats : un extrait de En Amérique de Susan Sontag lu par Michel Piccoli en hommage à l’éditeur Christian Bourgois. Les Assises semblent avoir trouvé leur rythme et leurs organisateurs planchent déjà sur la programmation de l’édition 2009. Quant à tous les lecteurs qui n’ont pu y assister et le regrettent, rien n’est perdu puisque les communications des auteurs présents seront regroupés et publiés dans un volume à paraître au format de poche chez Christian Bourgois au mois de novembre prochain, comme l’ont été les textes de la première édition.
Laurence Bourgeon
Ed.
0 p / 0 €
ISBN:
Au-delà de sa présence, chaque auteur invité a été mis à contribution en amont puisqu’il lui a été demandé de rédiger un texte en rapport avec le thème auquel il est associé. Il en fait lui-même la lecture avant que ne s’ouvre la discussion avec les autres écrivains, orchestrée par des journalistes français et étrangers. Mais le véritable point fort de ces assises tient dans la place accordée aux questions du public. C’est lorsque le micro circule sous la grande verrière des Subsistances - ancien couvent et ancienne caserne militaire reconvertie en lieu culturel - que la parole est réellement décloisonnée, plus libre et spontanée.
Durant cette semaine, il a donc essentiellement été question du romanesque, de la fiction et de ses limites, mais aussi inévitablement de politique. Politique en général dès lors qu’il y a confrontation de cultures et d’histoires différentes et selon que la fiction qui en découle est produite dans un contexte de censure ou de liberté totale. Ainsi, rien à voir entre Duong Thu Huong, Rafael Chirbes et Aleksandar Hemon d’une part - tous trois ayant connu des régimes répressifs en Corée, en Espagne et en ex-Yougoslavie - et Arthur Japin, dont le rapport à l’Histoire est forcément plus apaisé. Politique du livre également puisque la table ronde du samedi matin, consacrée à la circulation internationale des œuvres, coïncidait avec la remise en question récente de la loi Lang sur le prix unique et l’interdiction qu’elle impose de ne pas brader les livres au-delà de 5 % du prix de vente pendant les deux années qui suivent leur mise en vente. L’occasion pour les éditeurs français présents de réaffirmer l’importance de cette spécificité française et de réitérer leur soutien au réseau de libraires indépendants ; et pour les éditeurs étrangers, de corroborer leurs dires en témoignant de la déliquescence de la diversité des librairies et du conseil personnalisé.
Le roman n’est donc pas mort. Sa diversité semblerait même attester de son caractère fédérateur. Par delà les frontières, le roman est lu et écrit avec la même passion. C’est dans cette confrontation et ces mises en perspective qu’apparaissent des résonances ou se font écho de superbes voix. Rien ne pouvait mieux en témoigner que la lecture qui a clôturé cette semaine de débats : un extrait de En Amérique de Susan Sontag lu par Michel Piccoli en hommage à l’éditeur Christian Bourgois. Les Assises semblent avoir trouvé leur rythme et leurs organisateurs planchent déjà sur la programmation de l’édition 2009. Quant à tous les lecteurs qui n’ont pu y assister et le regrettent, rien n’est perdu puisque les communications des auteurs présents seront regroupés et publiés dans un volume à paraître au format de poche chez Christian Bourgois au mois de novembre prochain, comme l’ont été les textes de la première édition.
Laurence Bourgeon
Ed.
0 p / 0 €
ISBN:
Last modified ondimanche, 19 avril 2009 14:58
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