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Quand les emp�cheurs de tourner en rond s'effacent
| | Mamma, li Turchi ! Gabriel Matzneff La Table Ronde
| Prix éditeur 16.01 euros
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Un roman chatoyant aux inflexions m�diterran�ennes, doucement �pic� malgr� son arri�re-go�t d'amertume dont il n'est pas fait myst�re.
Cinq personnages constituent cette fresque napolitaine vivante : Raoul, Nathalie, Mathilde, Stefanie et Gu�rassime. Des �tres aux destins, aux int�r�ts et aux n�vroses distinctes qui se croisent ; nous avons la chance de partager deux ans de croisements qui construisent une intimit� inattendue, deux ans romanesques. Deux ans d'allers-retours du ciel souvent gris de Paris aux cascades de gloussements color�s d'Italie, de l'apprentissage de ce qui est plus qu'une langue au savoir, de l'isolement � l'unit�. Les figures singuli�res et attachantes de Mamma, li Turchi ! se d�couvrent comme les vaisseaux irrigu�s de s�ve d'un m�me �tre, dont l'idiome constitue le c�ur de rencontre, le r�pit, la d�couverte et la prolongation des amours.
L'amour est d�clin� sous toutes ses formes : amour de jeunesse et amour de la jeunesse, amour du paternel et du P�re. H�t�ro et homosexualit�, amour-amiti� et amiti� amoureuse sans attirance sexuelle. Une pers�v�rance de chacun, qui tente l'expression de soi sous une autre forme, dans une autre langue. Hommage � la vitalit�, � la puissance de l'homme qui se rel�ve de tout, au d�passement dans l'insouciance et la jouissance. Car ce roman est bel est bien un souffle qui balaie le drame : la solitude d'une Nathalie passefile, dont le chianti ne noie pas l'image de la m�re disparue ; l'ostracisme de pierre qui guette un Raoul parano � chaque coin de rue ; l'incertitude tranquille des sermons d'un Gu�rassime nullement convaincu de sa mission. Trois souffrances que l'auteur explore pour les avoir v�cues, quoi que sous des modes diff�rents. Deux notes entra�nantes : Mat' et Stef' caressant les chats noirs, les mots et la tristesse ; le refrain de la jeunesse est chant� et tout peut repartir.
L'ensemble a des allures de films que le cin�aste Raoul pourrait tourner, o� les dialogues et les images forment un ensemble de s�quences dont la chaleur ne le c�de jamais au raffinement. Avec l'accent (des cinq) qui fait son charme � la fluidit� du parler et nous rappelle que nul n'est parfait. La l�g�ret� de Matzneff nous traverse en traversant, gondoli�res, ses phrases ; nous faisant oublier leur principale raison d'�tre : li Turchi ! Mamma, ils ont disparu� Et l'auteur, �ternel et incorrigible amoureux, de rire, en italien toujours : il a r�ussi � les vaincre, puis � nous convaincre de partager sa gaiet�. J. L. N.
+ lire le portrait de Gabriel Matzneff
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