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L�Odyss�e chinoise
| | La Grande �le des tortues-cochons Liu Sola Seuil
| Prix éditeur 20.00 euros
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Liu Sola donne un beau guide, essentiel � qui veut se
pr�parer � l��mergence
d�un g�ant. �uvre ambitieuse, lecture enrichissante, difficile par
moment.
Ca n�est pas un scoop, C�line l�avait dit et d�autres avec : la
Chine se r�veille, le monde
tremble. Nous y sommes, � l�aube d�un matin calme inexorable,
le soleil se l�ve sur
l�Empire du Milieu, sa sagesse mill�naire, ses aphorismes
assassins, sa culture grav�e
dans le marbre depuis et pour longtemps. Autant dire une
�nigme fascinante qui angoisse
certainement plus d�un dirigeant am�ricain aujourd�hui. La
Grande �le des tortues
cochons est donc une occasion parfaite de regarder
comment la culture chinoise se
nourrit sereinement d�occident pour vraisemblablement lui
succ�der apr�s vingt si�cles de
domination. Tibidibidim dim dom dom dim� Car son auteur, Liu
Sola, p�trie de culture
chinoise, a arpent� New York et Londres avant de se r�installer
� P�kin en attendant le
grand soir. Dans ce livre ambitieux, elle m�le mythe fondateur et
Histoire r�cente, d�bats
occidentaux et philosophie traditionnelle dans un r�cit compos�
comme une suite,
variations sur tous les genres de la litt�rature chinoise. Une
initiation, donc, sur le fond
comme sur la forme.
Retour vers le futur
L�histoire est celle d�un mythe originel qui, comme tous les
mythes, �chappe au temps et �
l�espace. Nous sommes sur une �le myst�rieuse, en l�an 4000
d�on ne sait quel calendrier.
Premier vertige� Le lecteur fran�ais doit accepter de perdre
tous ses rep�res pour pouvoir
continuer et se laisser porter par une fable all�gorique. D�marre
alors le r�cit d�une
famille, les Ji, depuis ces deux fondateurs, et dont les
descendants sur plusieurs
g�n�rations vont et viennent entre l��le et un grand continent,
figure de la Chine, dont ils
vont tout apprendre. La forme est d�concertante, pleine de
po�sie, et la narration difficile
� suivre pendant une centaine de pages. Et � la mani�re
d�Ulysse, de Joyce, Liu Sola passe
en revue toutes les formes de narrations chinoises, des petits
traits de philosophie Tao
aux longues divagations de pure po�sie vaporeuse, en passant
par des dialogues de
th��tre qu�on imagine traditionnels. Tout un voyage au fond de la
Chine atemporelle.
La longue marche
Mais au fil de cette grande saga, remplie d�imaginaire,
surgissent des r�f�rences tr�s
identifiables, un certain � Parti de l�Unit� �, dangereux et utile
garant d�une longue marche
vers le pouvoir, le f�minisme et le matriarcat ( Quand on ne
comprend pas les femmes,
que peut-on comprendre � la politique ? ) et l�amour, surtout,
tout en d�licatesse,
passions ma�tris�es par un certain art : Baiser, c�est
r�pondre au besoin le plus
originel de la chair, tandis qu�embrasser, c�est un besoin de la
chair et de l��me .
L�Histoire r�cente, en nourrissant progressivement le conte �
force de m�taphores et
p�riphrases, se mue alors en r�cit romanesque plus de chez
nous. Voil�, peut-�tre
l�explication d�une culture in�branlable : la r�alit� alimente et
ressource l�imaginaire en
permanence. Au final, c�est � une descendante des Ji qu�il
incombe de retracer l�histoire
depuis son origine, une boucle sans fin, o� les morts reviennent
aupr�s des vivants.
Comme si l�avenir devait sans cesse puiser � la source de la
civilisation, une proph�tie
sonne au tout d�but du livre : G�n�ration apr�s g�n�ration,
ils racontaient � leur
descendants la l�gende des anc�tres partis en qu�te de Dieu,
mais plus personne ne savait
qui est ce Dieu, seulement qu�� force de le chercher ils avaient
trouv� l�empereur de
Chine. Soyons clairs, je crois qu�on parle de nous.
Tibidibidim�
Marc De Launay
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