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Fi�vre noire
| | Peste Chuck Palahniuk Denoel
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Roman borderline et exp�rimentation outr�e, Peste assume cr�nement son r�le d�anti-�vangile white trash. De son cul de basse fosse, un Palahniuk de la meilleure cuv�e : la litt�rature ne vous habituera pas � mieux.
Une �uvre m�morable se r�sume souvent � quelques tics marquants. La passion pour les ours et l�halt�rophilie d�Irving, l�onanisme de Houellebecq, le cat�chisme de Dantec font maintenant partie de la litt�rature comme les bandes de Buren appartiennent � la peinture. La post�rit� a son anecdote, l�immortalit� peut dormir tranquille. Malgr� sa versatilit�, c�est aussi le cas de Chuck Palahniuk, g�nial inventeur de forme, qui nous ressert dans Peste quelques uns de ses pr�cieux tics d�j� � l��uvre dans Choke ou M�lodie mortelle. Rien de bien grave rassurez-vous : ces petits rappels sont comme l�h�ro�ne, ils fid�lisent. Il y a pourtant beaucoup de nouveau dans ce Peste bubonique. La narration est construite sous forme d�une biographie orale : la vie d�un individu racont�e par les yeux de ceux qui l�ont connu. Cette personne, c�est Rant � d�o� le nom en VO du roman � ou Buster Casey. Un personnage, ce Rant : il est � l�origine de la plus grande �pid�mie de l�histoire de l�humanit�. Un � nocturne � pur souche : dans le monde pr�apocalyptique et surpeupl� que tricote Palahniuk, les hommes se partage la Terre enti�re. Le jour aux � diurnes �, la nuit aux � nocturnes � et un couvre-feu pour s�parer les deux pans de l�humanit�. G�nial, non ? Mais ce n�est qu�accessoire dans Rant, � peine le temps de s�extasier d�une id�e que Chuck Palahniuk est d�j� � la suivante.
Rage de vivre
D�o� peut-�tre le seul reproche que l�on puisse faire : le roman est tr�s d�coup� et parfois d�cousu. Mais quel pied ! Peste est puissamment anticipatoire, comme du JG Ballard combinant la vision de Crash et la dystopie de Millenium People ; ultra-inventif formellement, comme pouvait l��tre un Danielewsky dans la Maison des feuilles lorsqu�il n��tait pas encore perdu dans la rh�torique combinatoire de O r�volution ; mais aussi narrativement aussi l�ger que du Stephen King quand il s�agit de parler de l�enfance et de ses d�mons� Total, quoi. La construction de Peste �vite de plus les empilements macabres qui rendaient la lecture de A l�estomac l�g�rement redondante et �m�tique. Fin du fin en mati�re d�horreur, Chuck Palahniuk sait rester pop quand c�est n�cessaire. Que demander de plus ? Il �mane toujours de toute l�oeuvre de ce � shock writer � cette impression que l�humanit� vit au bord d�une d�charge : mais qui n�aime pas cette sensation doit �viter la lecture de ce nihiliste pur souche. Les narrations de Chuck Palahniuk sont de puissants antidotes � l�optimisme et � la joie de vivre. Son prochain roman s�appelle Snuff, et, d�apr�s le titre, cela ne va pas �tre de la chick-litt. Sacr� Chuck, il ne rate d�cid�ment pas une occasion de nous rendre naus�eux. Laurent Simon
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