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Des phrases courtes, ma ch�rie
| | Des phrases courtes, ma ch�rie Pierrette Fleutiaux Actes Sud
| Prix éditeur 14.94 euros
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Un r�cit compl�tement diff�rent, in�dit.
Histoire de Pierrette Fleutiaux, qui �crit sur la vieillesse. Bien plus que de l�encre, c�est une eau tr�s sal�e que crache sa plume : le d�clin d�une m�re, des piliers fondateurs d�une enfance qui se raccroche l� o� elle le peut encore. La perte d�une m�re ? c�est une partie de l�identit� qui s�envole. Qui peut t�moigner des premiers jours, des premi�res peurs et des premi�res joies v�cues, si ce n�est l��tre qui vous a mis au monde ? Qui peut encore t�moigner de la tangibilit� de votre existence ?
Des phrases courtes, ma ch�rie ! L�exclamation de la pauvre femme rel�gu�e au placard de la vie laisse poindre de l�enthousiasme, elle qui pourtant range les ouvrages de sa fille romanci�re au fond de la biblioth�que, comme si elle avait peur de montrer sa fiert�. Et en effet, tout l�enthousiasme et toute la fiert� contenue dans le texte vient de celle qui va mourir, alors que les yeux de celle qui en est le principal t�moin n�expriment que lourdeur et mortification. C�est l�angoisse de la d�liquescence et de la faiblesse, l�angoisse de la fuite de la jeunesse v�cue par un �tre jeune qui sont les moteurs de l�histoire. � Ma col�re tourne � la fureur. L�avenir, toujours l�avenir, jamais le pr�sent. Nous sommes vieux, d�j�, nous aussi. � Le temps presse, m�me pour les autres.
Ce n�est pas une vieille femme qui recule devant la mort mais bel et bien sa fille, pour qui le miroir offert en ces circonstances n�est que trop repr�sentatif de son propre devenir. Et ce n�est plus vraiment la fin imminente de la m�re qui est l�enjeu du roman, mais la mort de l�auteur elle-m�me, et son identit� qui n�en finit plus de se diluer au contact du fant�me vivant : � Souvent, quand je suis aux c�t�s de ma m�re, je ne sais plus si je suis plus �g�e, ou jeune, ou au milieu. �
Nous affrontons ici avec l�auteur les r�cits d�ultimes parcelles de vie dans une pension de retraite. Et la fille de s�interroger et de se torturer : a-t-on choisi le bon endroit ? a-t-on proc�d� de la meilleure mani�re qui soit ? � Peut-�tre mes questions ne sont-elles pas les bonnes, mal formul�es, avec des mots d�aujourd�hui qui ne conviennent pas, avec un point d�interrogation qui fait violence�Je suis souvent violente avec ma m�re �. La culpabilit� est omnipr�sente : l�auteur n�est-elle pas celle qui dramatise et qui rend les choses plus difficiles qu�elles ne le sont en r�alit� ? � Est-ce donc moi qui toujours fausse toutes les boussoles lorsque je suis avec ma m�re ? Elle se d�brouille bien, elle n�est pas si vieille, pas si d�munie. (�) Question obs�dante : est-ce moi qui fous la merde ? �
Un exorcisme, certainement : en finir avec le lien trop t�nu qui maintenait Pierrette Fleutiaux prisonni�re, en finir avec l�histoire de la chute si p�nible de la disparue. Une vieille femme a lentement descendu la pente, et c�est tout l�insupportable de sa nonchalance inexorable, de son acharnement � suivre le cours normal des choses, que l�auteur nous livre dans ce r�cit poignant, qui n�est fiction pour personne.
J. L. N.
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