#112 - Du 14 octobre au 05 novembre 2008

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Histoire d'une autopsy

 Le Cri du sablier
Chlo� Delaume
farrago/�ditions L�on Scheer
Prix éditeur
13.00 euros

" En banlieue parisienne il y avait une enfant. Elle avait deux nattes brunes, un p�re et une maman. En fin d�apr�s-midi le p�re dans la cuisine tira � bout portant. La m�re tomba premi�re. Le p�re visa l�enfant. Le p�re se ravisa, posa genoux � terre et enfouit le canon tout au fond de sa gorge. "
Tuer lep�re, c�est ce � quoi nous exhorte Le Cri du sablier, r�cit en forme de r�miniscences. Une voix qui va, gronde, murmure, un flot de paroles d�une invention et d�une force qui bien souvent forcent le barrage du sens. Au commencement �tait non pas le Verbe mais son absence, provoqu�e par un de ces drames sordides qu�on retrouve g�n�ralement � la rubrique des faits divers. Seule rescap�e de l�affaire, la fillette garde le silence neuf mois durant et c�est la femme, r�guli�rement relanc�e par une autre voix tenant le r�le du psychiatre, qui revient sur son enfance meurtrie.
Les Mouflettes d�Atropos, le premier roman de Chlo� Delaume, avait ouvert la voie � une entreprise de reconqu�te de la langue, au d�sir effr�n� de concasser le magma verbal pour trouver les mots. C�est que l�horreur ne se satisfait pas des phrases de tous les jours, elle a ses tics, ses rimes, sa musique. Donnant la parole � une ex-prostitu�e, l�ouvrage reliait au monologue, fil conducteur du r�cit, une recette de cuisine, un article de journal, des citations et autres formes d��criture o� les italiques, blancs et capitales s�entrem�laient. Les collages et la syntaxe saccag�e chantaient l�innommable quand la narratrice constatait que " la chatte n�est qu�une auberge de jeunesse.
Pour les putes, un peu espagnole. Il faut s��tre prostitu�e pour le savoir. Pour relativiser le pouvoir des biroutes et le pouvoir des hommes. Remettre la sublimation du co�t � sa place. Entre la lampe Arts-D�co et la photo du petit dernier. Quand par m�garde on prend son pied avec un vieillard bien membr� � la fin on revoit sa position. D�autant qu�on a des crampes. Pour peu, face � un corps aim�, on h�siterait � se faire prendre. La femme sera toujours un r�ceptacle. Juste un foutu r�ceptacle. Les hommes y mettent en vrac bite fantasmes pulsions transferts �mois amours et parfois m�me le prix. Tout �a d�pend des bourses. "
En filigrane des deux ouvrages, un auteur qui n�a pas froid aux yeux mais ne tombe jamais dans le voyeurisme gratuit ou pseudo-esth�tique. Le sujet fait mal et la plume fait mouche, flirte avec l�exp�rimental, explore toutes ses possibilit�s, joue de ses d�bordements pour mettre au jour d��tonnantes trouvailles langagi�res. Le Cri du sablier varie sur tous les tons son th�me principal, d�clamant qu�" on dit de l�un ou de l�autre : il n�a pas tu� le p�re. Comme si mort symbolique pouvait �tre effective alors que la clinique elle-m�me ne r�sout rien. Je n�ai pas � occire un cadavre d�soss�. Je n�ai pas � singer des tu quoque filia par le sang r�pandu sois maudite aux chim�res. "
Si l�ouvrage reste dans la m�me veine que Les Mouflettes d�Atropos, il se ma�trise davantage, plus concentr�, structur� autour de l�image du titre : " Je t��viderai de moi mon charmant Roi p�cheur mes tripes empoisonn�es au fumet aigue-marine. Je te cracherai enfin toi qui sus mieux qu�un autre obstruer mon larynx. Il sera plus d�un mur qui l�zardera glaires sous l��cho ruisselant du cri du sablier. " La forme s�est �pur�e mais le fond reste aussi brutal et excessif, cette fois sur le th�me " Familles, je vous hais. "
Demeure un labyrinthe de phrases h�riss�es de formules lapidaires et de m�taphores o� plusieurs logiques servent de fil d�Ariane : association d�id�es, jeux de mots et d��chos, oreille musicale, r�f�rences litt�raires et mythiques permettent de broder sur le canevas initial, l�enrichissent jusqu�� lui donner l�envergure d�un vaste po�me � la Michaux, d�une puissance d�vor�e et d�vorante. Pas le temps de souffler car la narratrice retourne sans cesse le sablier, va-et-vient et nous ram�ne sur les traces d�une famille d�chir�e, trio banlieusard domin� par la figure du p�re, capitaine de navires et accessoirement bourreau pourri de haine et de destruction. Du chaos verbal ressortent des sc�nes qui toujours font la ronde autour de l�explosion fondatrice, se ramifient pour mieux remonter jusqu�� elle. Du confessionnal o� l�enfant s�accuse des sept p�ch�s capitaux au mariage d�sastreux en passant par les cartes du jeu de Memory ou les coups de martinet, ces �pisodes ont tous leur place et font sens les uns par rapport aux autres, kal�idoscope d�une identit� qui tente de se reconstruire ou d�un film qu�on remonte.
L� " autopsy " est fascinante, port�e par un style et une langue qui laissent bouche b�e.

Minh Tran Huy



 
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