|
|
L��il du barbare
| | L��il du barbare Virginie Lou Actes Sud
| Prix éditeur 14.00 euros
|
Epop�e farouche, exp�dition meurtri�re, expansion consid�rable du domaine de la lutte : L��il du barbare est � la fois un peu de tout cela et quelque chose en plus. Que dire ? Guerre et vengeance, revanche de fer et de feu apr�s une injustice.
Ce livre vous tient le couteau sous la gorge ou presque. Une fois les premi�res lignes parcourues, difficile de le laisser. Et m�me si vous n�aimez pas les effusions de larmes et de sang, cette complainte lancinante -que pourrait marteler un m�nestrel d��poque- ne vous laissera pas en paix. Est-ce parce que, de mani�re inattendue, l�auteur se sert du pronom si peu usit� qu�est le � vous �, et cr�� de facto un terrain non pas propice � l�identification mais � l�implication directe du lecteur ? Ou est-ce gr�ce � l��nergie constante que d�gage cette histoire sans surprise mais aussi sans pause aucune ?
Car nous voil� plong�s au c�ur du Moyen-Age, aux c�t�s d�un petit enfant qui suit les combats maritimes de sa g�nitrice (le mot est pes�) sur le Saint Barth�lemy (nom d�j� �vocateur�). Et l�on ne peut que haleter au gr� des espoirs et des sursauts de cette derni�re. Partie sur les sentiers de la r�bellion pour venger son mari l�chement et tra�treusement tu� par le Roi Philippe, la Dame n�aura de cesse de bafouer l�autorit� en place et de repr�senter les minorit�s du royaume (appui de taille, on en conviendra �mais la Dame est une fine politique). Nous serons t�moins de ces longues ann�es de lutte et de conflits, qui constitueront l�apprentissage de cet enfant orphelin devenu homme -le narrateur- mais qui lui �teront tout sens de l�amour et de la tendresse, toute illusion de douceur.
C�est sur la tombe de sa m�re tant v�n�r�e que nous le retrouvons recueilli, pronon�ant une inhabituelle et ultime oraison fun�bre : il y confessera ses douleurs d�a�n� mal aim�, exprimera ses craintes et ses exaltations pass�es, parlera de la frustration n�e de son effacement en d�pit d�une constante bravoure (� le faucon [elle] et le h�ron [lui]�) et de sa tristesse d�enfant m�pris�.
Le fils rectifiera enfin la l�gende qui voulait qu�elle soit, sur le Saint Barth�lemy, � seule � bord avec deux enfants abreuv�s de sang humain �.
Ainsi qu�on peut le constater, l�admiration qu�il lui voue est sans borne, aux limites de l�inceste : � Votre autorit�, la majest� de vos gestes m�enchantaient �. Celle qui est sa � Reine �, celle qui l�oblige, � douze ans seulement, d�embrasser une � Cause � qu�il ne peut comprendre, n�est pas ouvertement bl�m�e. Non, on se trouve seulement au Purgatoire avec elle. M�rite-telle le Paradis ? Aura-t-elle eu raison de privil�gier la m�moire de son homme sur l�enfance de ses enfants ? Car la seule fois o� cette Amazone d��oit sa prog�niture� est lorsqu�elle s��teint.
Finalement, m�re h�ro�que ou m�re indigne ? Ou m�re tout court ?
Constat de ce que la violence serait le seul destin et l�unique recours des enfants sans m�res : au fond, ce livre ne serait-il pas un brillant essai sur la maternit� et ses responsabilit�s ? Fabrice Aimmant
| | |