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La soupi�re
| | La soupi�re Cookie Allez Buchet Chastel
| Prix éditeur 11.00 euros
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Cookie : un nom all�chant. On l�imagine tendre, craquant � l�ext�rieur et moelleux � l�int�rieur ; pas assez cuites, les p�pites de chocolat fondraient presque sous le palais une fois enrob�s par la chaleur de la langue.
C�est d�une dr�le de soupe dont il va s�agir dans le pr�sent ouvrage, o� ne finit par dominer qu�une seule saveur : celle de la frustration.
Marie et Bernard, Bernard et Marie. Un couple � la vie comme � la mort aussi mal assorti que possible, dont les noces ne furent pas barbares mais en tous cas douloureuses : Bernard est en effet un b�b� non d�sir�, et le divorce m�re-fils se r�v�le de plus en plus difficile � mesure que les ann�es passent.
Marie tentera donc toute sa vie de regagner sa dignit� perdue lors de l�accouchement, s�affranchissant r�solument de la honte d�avoir un enfant sans p�re et sans situation. Elle devient une couturi�re renomm�e dans son quartier, habille son fils � comme un petit monsieur � et r�ve pour lui d�une grande carri�re qui ne se r�alisera pas. M�re pesante et castratrice, Marie se fait un devoir d�assumer jusqu�au bout ce grand gar�on de plus de cinquante ans devenu infirmier - moyen comme un autre d�oublier sa propre mis�re, s�occupant de n�cessiteux plus mis�rables que le couple �trange qu�il forme avec cette g�nitrice abhorr�e ? N�avoue-t-il pas que cette derni�re finit d�ailleurs par accepter sa vocation lorsqu�elle s�aper�oit que les mots qu�il utilise sont plus savants que les siens... �masculation et claustration, Marie sent peu � peu la d�croissance de son utilit� tandis que Bernard fr�quente les putes et rentre � l�heure pour manger la soupe de Maman.
La situation ne peut qu�exploser, ainsi que cette soupi�re aux allures de cocotte minute oubli�e sur la gazini�re qui tr�ne sur la table du salon de Marie. Une bonne louche de non-dits, d�amers reproches qui mac�rent dans un court-bouillon de silence, une pinc�e de tradition et de respectabilit� : le m�li-m�lo imperturbable des r�les de la m�re et du fils devient chaque jour un peu plus dangereux. Et c�est ainsi que l�on a envie de la briser, cette soupi�re ; afin de conna�tre les recettes empoisonnantes de la m�re et de comprendre le myst�re qui retient Bernard dans le pavillon. Jeter la vasque par la fen�tre, comme pour rompre le sort qui impose � une m�re de nourrir un fils devenu �tranger, et � ce fils d�accepter une soupe avari�e.
Le rythme est toujours soutenu, presque insoutenable. Le symbolisme de cette soupi�re pose les questions essentielles du roman et le suspense est maintenu jusqu�� la fin pour assommer jusqu�aux plus dures des t�tes de bois. On parle souvent de b�che de No�l, on pensera d�sormais � la soupi�re de Cookie Allez. J. L. N.
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