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Mer Calme � peu agit�e
| | Mer calme � peu agit�e Alexandre Millon Le Dilettante
| Prix éditeur 13.00 euros
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Mer calme � peu agit�e, le second roman d�Alexandre Millon est publi� aux Editions du Dilettante. Et �a lui va bien. Dans son �criture joueuse et fr�n�tique, on retrouve avec bonheur la d�finition formelle du dilettante, nom pr�cieux mais commun: celui qui s�adonne � un art en amateur, pour son seul plaisir. En plein dans le mille, Millon sait mettre en sc�ne une jubilation constante qui �claire consid�rablement le r�cit. Mais sur ce point nous reviendrons.
D�abord, Samuel Sarandon, le h�ros bruxellois qui vogue sur une mer de dialogues pr�-fabriqu�s et de sociabilit� molle. Version bobo �clair�. Samuel Sarandon, un de ces golden boy brillants pour qui la carri�re s�est enfonc�e lamentablement dans un d�sert d�objectifs. Une existence minut�e, r�gl�e et logiquement monotone. Un ami cher : Baize. Pr�nom d��picurien, d��change de sensations �pidermiques sans pouvoir s�extirper des mailles du confort bourgeois. Un confort qui cr�e des certitudes localis�es, qui se cognent, se mordent, naissent les unes des autres. Ensuite, Camille employ�e � la Fnac, le grain de fantaisie qui vient remettre en cause cette apparente pl�nitude, r�v�le la vacuit� des sentiments et des engagements. Samuel est mis � nu comme bien souvent, dans ces histoires de l�amour o� l�autre devient un horizon qui destine. Plus haut et plus fort que tout. Un but : la conqu�rir. Un battement de c�ur : le chant de l�amoureux. La passion s�immisce dans une existence d�homme bien ordonn� pour en faire surgir les fissures, affectives et spirituelles. C�est banal mais vital aussi. Combien nombreux et reconnaissants sont les corps d�sincarn�s d�envie vers lesquels l�alt�rit� a tendu sa main gracile et sertie d�esp�rance ?
Alexandre Millon parle de choses tristes, de cette incapacit� propre aux soci�t�s riches et � leurs composants de ne pouvoir s��merveiller, de dissoudre leurs irr�gularit�s �motionnelles pour en finir avec les relations qui impliquent, risqu�es, vertigineuses. Il parle de choses tristes oui. Mais partout la gaiet� pointe. Il parle doucement, avec un accent narr� o� se m�langent la Belgique de ses origines, les peurs de sa quotidiennet� et les espoirs de ses destinations amoureuses. Sans jamais briser les �lans rythmiques, il agr�mente son propos d��tirements et de contorsions sur les grandes questions du d�sir et du d�sir de l�autre. Avec son langage touche-�-tout et explorateur ironique, le narrateur parvient avec finesse � marquer des v�rit�s troublantes. Un seul exemple : il est question � la page 130 du sens oblatif de l�amour. � Il �tait sur le point de comprendre que l�amour, le vrai, ne passe pas par quelqu�un sur lequel on s�appuie, mais passe par quelqu�un qui nous aide � nous passer de cette habitude. �
En une seule phrase r�dant au d�tour d�un passage simple et �pur�, on a tout compris. Si vous cherchez un grand feu d�artifice litt�raire, les danses des mots, les exc�s et les souffrances de la passion amoureuse, passez votre chemin. Vous croiserez peut-�tre Alexandre plus tard. Et qu�� cela ne tienne, il a l�air d�aimer les rendez-vous. Son texte est d�ailleurs truff� de petites portes qui s�ouvrent sur la l�g�ret� et la joie, de toutes petites choses qui s�agglutinent, s�enfuient et reviennent avec ferveur pour nous faire sourire et nous faire poursuivre. Pas un chef d��uvre, un mastodonte du style et de la post�rit�. Mais un petit plaisir radieux qu�en zonarde lucide, je vous invite � consommer sans pudeur, ni mod�ration.
Céline Mas
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