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Nous avions accost� � Guayaquil
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     | Prix éditeur 13.00 euros
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Contrairement � l'exotisme, le voyage n'a pas le vent en poupe. Car il faut bien distinguer les deux choses : le voyage, qui vient de via, en latin (la voie, la route), est un mouvement, alors que l'exotisme d�signe simplement le caract�re de ce qui est �tranger (exo). Le voyage implique n�cessairement un d�placement, une implication de soi dans l'exotisme. Mais qui, de nos jours, s'engage sur les chemins du monde ? Qui fait encore corps � l'exotisme ?
Officier de marine, Lo�c Finaz rel�ve le d�fi d'une mer trop calme. Par son r�cit � la premi�re personne (un jeune marin enamour� d'un "tu"), l'auteur �vite le plus grand danger de l'�criture : le plat. Temp�tes et mar�es ne sont pas imp�ratives pour une aventure romanesque, mais la bourrasque d'un style, oui. D�vou� � l'�quilibre, Finaz exploite l'ing�niosit� de mesurer ses n�gations : peut-�tre a-t-il appris dans un port oriental que le positivisme absolu menait au bonheur. Pieds ancr�s dans une mer int�rieure agit�e, Finaz ne s'embourbe ni de remord ni de regret. A croire que les marins emportent des c�tes rocheuses un coeur de pierre. Ne reste de la terre que ce "tu" d'amour perdu � cette femme rest�e � quai.
La distance, "m�diation sans piti�", le fait revenir aux raisons de cette s�paration. Loin des yeux pr�s du coeur, "tu avais du sentir ce d�calage, cette fa�on que nous avons malgr� nous de n'�tre jamais vraiment revenus, m�me apr�s l'accostage." Pourtant, tu savais d�s le d�part que tu l'aimais pour �a, justement, pour ses yeux absents. Ton homme se f�licite de l'atmsoph�re de groupe qui le garde en vie, mais ce n'est l� que consolation. Au fil des pages, de plus en plus pr�sente, malgr� les airs, il ne t'oublie pas.
Tenant la distance, Finaz livre modestement quelque chose d'imp�rial. Une belle le�on d'humide humilit� pour un roman renouvelant un genre oubli�.
Ariel Kenig
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