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Disruption Live
 | | Disruption Live Jean-Marie Dru Village Mondial
     | Prix éditeur 30.00 euros
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Les mouvements anti-pubs cachent souvent la parole des publicitaires eux-m�mes. Enferm�s dans leurs joyeux bureaux bord�liques de l'ouest parisien, ils n'ont jamais la parole. On pourrait croire qu'ils s'expriment sur leurs panneaux de m�tro, mais les affiches coll�es �a et l� ne sont le fruit que d'incroyables pressions d'annonceurs. Le d�bat public n'existe pas. La pub ? On aime ou on n'aime pas. On supporte ou on ne supporte plus. S�gu�la est devenu un r�f�rent m�diatique alors qu'il n'est plus rien. Les cr�atifs d'agences (ceux qui con�oivent les campagnes : les "cr�as") l'ignorent. Papi encha�ne les �missions : minable. Heureusement qu'une horde de "disrupteurs" se cache derri�re les buissons b�tes et sombres.
Essai publicitaire, Disruption n'est ni r�serv� aux �tudiants en manque de rock'n'coke', ni aux d�fricheurs de tendances. Il fait le bilan d'une pens�e qui fit (et continue de faire) le succ�s de marques comme Absolut, Nissan ou Play Station. Comme de grands auteurs, cin�astes ou peintres, une poign�e d'hommes s'est conduite en "rupture". De l� est n�e une th�orie publicitaire : la disruption. En bref, il s'agit d'implanter une marque dans un territoire de communication autre que celui que l'on attend. Surprendre pour s�duire. S�duire pour vendre. On pourrait crier � la manipulation, � la fourberie de grands groupes internationaux, � l'abrutissement des consommateurs, mais la marque n'est plus pens�e en tant que pouvoir assis, mais en perp�tuelle renaissance. Le consommateur s'en tire plut�t bien. Et l'auteur aussi.
Pr�sident d'un des plus grands r�seaux d'agences mondiaux (TBWA), Jean-Marie Dru et ses collaborateurs ont la pertinence de n'�tre s�rs de rien. Un monde idyllique est n�... avec ses limites. Au-del� de l'empathie contaminante de ce formidable succ�s, il faut y voir une m�thodologie implacable acquise par un petit nombre d'individus. L'entreprise est intelligente (elle s'attaque � toutes les conventions), mais cr��e immanquablement les siennes : le pass� n'existe plus, toute nouveaut� est vou�e � dispara�tre, la cr�ation est forc�ment destructrice, etc. Les filous se mordent la queue : ils d�voilent les rouages de la capacit� d'absorption infinie d'un n�o-capitalisme terrible. La Disruption rattrape � la fois nature (on parle de "Disruption dans l'ADN") et culture (de Nelson Mandela jusqu'aux artistes maudits). Sans que nous le sachions, la disruption �tait n�e avec le monde. Elle est d�sormais publicitairement th�oris�e.
Plus nous avan�ons, plus nous comprenons nos syst�mes et plus nous nous soumettons � ceux-l�. Monsieur Dru, pourquoi ne pas avoir choisi un autre sujet, comme celui de l'�chec ? Sans doute parce que la pub ignore le sens du romantisme.
Ariel Kenig
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