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Le Jardin Forteresse
| | Le Jardin Forteresse Claude Pujade-Renaud Actes Sud
| Prix éditeur 19.00 euros
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Il �tait une fois, du temps de l�Antiquit�, une �le. Celle-ci abritait trois petites filles vivant sous le joug de Denys de Syracuse, leur "tyran" de p�re : Sophro, qui signifie "mod�ration", Dik�, "justice" et Harmonia, "harmonie". Ces enfants, n�es de Doris de Locres et d�Aristomaque, les deux �pouses de Denys, ne vivaient que de jeux, de musique et d'ablutions parfum�es. Leurs seules peurs �taient inspir�es des l�gendes de l�Olympe cont�es par leurs servantes � l�heure des baignades. Ne voyant pas souvent Denys, leur p�re est la personne que les petites admirent le plus. Divinit� � leurs yeux, m�me dans ses choix les plus absurdes, il sait "construire, combattre, administrer la cit�, trouver de l�or, des hommes..." et ces �dipiennes ne pensent pour cela qu�� lui plaire. Leurs m�res, plus humaines, quant � elles, n'�tant que des g�nitrices jalouses et m�disantes.
MYTHOLOGIES COMPAREES
L�heure est grave, et Denys doit assurer sa descendance politique. Ses choix se r�v�lent �tre simples : il va marier Harmonia et Dik� � ses deux fr�res et Sa Sophro, celle qui lui ressemble le plus, celle qu�� d�faut de pouvoir toucher, il ne pourra que mettre dans le lit de son fils, � Denys le petit. L�enfance s�ach�ve brusquement lorsque ces filles enfantent la chair de leur sang. Harmonia, la plus jeune, ne s�en formalise pas. Elle est belle et son �poux ressemble � son p�re. Par la suite, elle prendra m�me un amant. Que vouloir de plus ? Dik�, elle, regrette que son �poux ait autant de scrupules � la toucher. Elle est mari�e et pourtant vierge. Sophro, viol�e par son demi-fr�re, ne peut que vomir la situation et se d�clarer "femme de Denys le petit et belle-fille de mon p�re, s�ur d�Harmonia devenue ma tante par alliance, demi-s�ur de Dik� qui est la femme de mon oncle et la belle-s�ur de mon p�re." Elle jettera litt�ralement les r�sidus de sa grossesse � Dik�, seule solution � son malheur.
Le Jardin Forteresse, v�ritable trag�die antique, ne se borne pas � d�crire la "douceur" de l�inceste. Il analyse �galement en profondeur la place de la femme au temps de Platon. Celui-ci appara�t m�me, d�nigrant comme tous les autres hommes du roman, le "sexe faible". En effet, outre le fait que la femme n�est ici qu�un outil � enfanter, elle n�a �galement pas le droit � la pens�e philosophique. Id�ologie pourtant forte � cette �poque. Le seul pouvoir d�Aristomaque, l�une des deux �pouses de Denys, ne sera que de pouvoir conseiller � son mari de remarier sa fille, Harmonia, � son fr�re Dion, l�autre �pouse n�ayant ni l�envie ni le caract�re de s�y opposer. Sophro, elle, ayant h�rit� du temp�rament cyclonique de son p�re, ne pourra que contr�ler son corps afin de ne plus enfanter, � d�faut de pouvoir cracher son malheur.
La place de la femme et les relations diplomatiques d�un tyran au temps de l�Antiquit� : voil� deux th�mes � ressorts. Est-ce bien diff�rent de nos jours ? Les tyrans deviennent pr�sidents et la femme cherche toujours sa place dans la soci�t�. En effet, ce serait mentir que de dire que les pens�es f�minines ne sont pas reconnues partout dans le monde, cependant, il est toujours difficile pour elles de s�affirmer en tant qu��gales masculines. Dans certains pays, elles gardent toujours le voile. Tradition ou Punition ?
Carine Pigny
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