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La Rambla Paralela
| | La Rambla Paralela Fernando Vallejo Belfond
| Prix éditeur 16.00 euros
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La Rambla Paralela touche effectivement un th�me philosophique et litt�raire fondamental : la fuite du temps et son irr�versibilit�. Avec ce que cela appelle de tragique : la perte de l�enfance paradisiaque et la mort in�luctable.
Le personnage se situe exactement dans cette probl�matique. En fin de vie, il revisite le pass� ses lieux chers et ses morts. Non sans une infinie tendresse empreinte de r�signation. Il se rem�more la maison familiale, sa grand-m�re et sa chienne qui fonctionnent comme des leitmotiv. Certes, le sujet est classique. Mais Fernando Vallejo le renouvelle au sein d�une histoire inqui�tante.
D�s les premi�res pages, le r�cit se d�robe. La voix de l�auteur s�imbrique dans celle du narrateur qui s�imbrique dans celle du maestro. Tant�t elles se fondent � l�unisson, tant�t elles se contredisent. Imitant avec justesse les tourments du vieux qui poussent jusqu�au d�lire. Les doutes, quant � savoir qui parle, plane � chaque instant. La narration se r�v�le alors particuli�rement instable. Et les rep�res brouill�s, presque inexistants.
Pour ajouter � la d�route, le vieux est insomniaque et alcoolique. Si bien qu�il hallucine, confond les �poques et divague. En l�absence d�ancres, les fronti�res g�ographiques et temporelles se d�sagr�gent. Cristallis� dans sa pens�e, il enferme le lecteur avec lui. S�ensuit un sentiment de vertige angoissant et d��touffement.
Car en d�finitive, La Rambla Paralela est moins une souvenance qu�un r�glement de comptes. Le vieux jette son anath�me sur le monde. Il critique, p�rore, accable, crache sa haine de tout. La prolif�ration des usines, des voitures et des gens, la crise des valeurs� tout y passe. C�est simple, il d�teste tout et tout le monde et surtout cette monstruosit� d�Homo Sapiens. A moins que ce ne soit lui qu�il ha�sse le plus ? Fernando Vallejo himself !
Lui qui � �crit comme un r�o colombien, comme un furieux, comme un homme qui est en guerre contre le monde parce qu�il n�est pas en paix avec lui m�me. �
Sa parole surgit dessous celle du vieil �crivain pour finir par la d�passer.
Les souvenirs et les acc�s du vieux sont les siens. Ils le hantent et tournent dans sa t�te comme un disque ray�. Et le tuent.
Vallejo �crit comme il est. Il ressasse et r�p�te. Sa prose est impulsive, obsessionnelle, furibonde. Celle d�un homme entier, excessif, corrosif. Un homme qui veut repousser les limites toujours plus loin. O� juste un homme qui craint de mourir ?
Son roman est tout sauf paisible. Le lire c�est le vivre. C�est descendre dans les limbes de son esprit . C�est se cogner, �touffer, sentir la mort pour mieux respirer. Un pur moment de Rock�n Roll !
Doreen Bodin
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