Les g�ocroiseurs Eric Pessan la Diff�rence

Prix éditeur 15.00 euros

2004. Cinq g�ocroiseurs, des m�t�orites d'une �nergie quatorze fois sup�rieure � la bombe d'Hiroshima, menacent de percuter la terre. La t�l�vision suit l'�v�nement avec fr�n�sie depuis des mois. Il reste trois jours avant l'instant de la collision. Le parfait sc�nario hollywoodien somme toute ! Mais personne pour sauver la plan�te !

Le personnage principal du roman est un vieux schnock � la retraite. Clo�tr� dans sa cabane, il attend le jour J parmi ses livres et ses cahiers. Pourquoi sauverait-il sa peau ? Il n'est plus rien. Et le ciel lui offre une apocalypse, sujet auquel il a consacr� sa vie.
C'est l'argument qu'il sert aux deux gendarmes qui viennent le d�loger. Conscient qu'il ne peut faire poids face � deux repr�sentants de l'ordre, il a recours � la parole. Le langage devient son arme de r�sistance. Et le moyen peut se r�v�ler efficace pour qui sait le ma�triser. Tel est le cas du vieil homme. Il entra�ne ses adversaires sur son terrain. Gr�ce � un long dithyrambe qui m�le r�flexions existentielles et souvenirs, il parvient � tromper leur vigilance. Et s'enfuit.

Mais sa victoire est plus profonde. Il est parvenu � rompre le silence dans lequel il s'est emmur� toute sa vie. Cet homme, inapte � communiquer, s'est volontairement tenu � l'�cart du monde et de sa famille. Devant sa belle-fille et sa petite-fille qu'il retrouve apr�s son �vasion, il est intarissable. Il leur livre ses pens�es les plus intimes. Et comble ainsi par les mots, l'absence d'un p�re, d'un beau-p�re et d'un grand p�re � la fois.

En parall�le, le fils se dirige vers la maison du vieux bonhomme. Sur le trajet, il raconte � son tour son histoire � deux auto stoppeurs. Les deux discours se font �cho, reli�s par celui du plus jeune des gendarmes. En effet, ce dernier s'est entretenu successivement avec les deux hommes. Il leur sert de m�diateur. Et r�tablit ainsi indirectement la communication bris�e.

L'approche de la mort pousse le monde � revenir sur son pass�, ses manques et ses impossibilit�s. C'est une r�action classique. Et les trois personnages ne d�rogent pas � la r�gle. Cependant leurs �panchements sont secondaires. Car ce qui en jeu dans ce roman, c'est le langage. Quand la science et la technologie ne peuvent rien, ils ne restent � l'Humanit� que des mots. La parole r�v�le l'homme � lui-m�me. Elle lui permet de faire surgir ce qui est enfoui au fond de lui. Ainsi lib�r�, il peut recommencer. Car en r�alit�, " le vrai d�sordre ne peut na�tre qu'� l'int�rieur."

Doreen Bodin