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De serpents en fleurs
| | Froides fleurs d'avril Isma�l Kadar� Fayard
| Prix éditeur 14.94 euros
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On savait l'Albanais dou� : il se surpasse. Le gel particulier dont il enduit le roman en toile de fond d'une love story commune �clipse bon nombre d'ouvrages �trangers parus � l'automne, et fait boule de neige avec l'ensemble de ses �uvres en neuf tomes publi�s chez Fayard.
B�, petite ville du Nord de l'Albanie, sort d'un long sommeil d'hibernation communiste, s'�merveille des us occidentaux que sont braquages, �pilation pubienne, voyages organis�s et d�l�gations du Conseil Europ�en. Mark d�ambule, spectateur curieux et nostalgique, somnambule. Ses taches de bleu se teintent en noir lorsque la jeune fille qui est sa ma�tresse l'entra�ne sur les chemins du doute : tout lui saute au visage. L'�il de son p�re, celui d'une Inquisition qui n'est pas que russe. Guentian incarc�r�. Les cils de la jeune fille. Sa conviction d'�tre la proie r�v�e des violeurs. Et puis qu'importe : malgr� les verrous qu'il fait poser aux portes, peut-�tre souhaite-t-il �tre d�valis� de tout ? Il a fini de r�ver l'immortalit�, tantalienne, qui frappait � sa porte. Et le Kanun d'�tendre ses pages claires et incendiaires sur un peuple qui ne s'est pas vraiment r�veill�.
Des mod�les br�lants de fi�vre dans leurs peaux de serpent, la r�solution du pass� n'est pas qu'un spectre : les fleurs ne sont pas encore �closes. Le texte de Kadar� est thermique et �pidermique : j'oscille entre r�signation imberbe, d�nonciation drue de la r�surgence des coutumes et c�l�bration du retour sur soi �donc sur ce qui a �t� � explicatif. Mark barbouille et bredouille, mais sait que tout doit �tre ouvert et d�couvert, ainsi que ces Archives transform�es en vulves. D�licates touches dont Kadar� n'abuse que pour mieux sugg�rer ; suspensions afin de nous laisser libre de conclure. La mise � nu, la mue, ne peut se faire dans la ti�deur ou dans l'euphorie : reste ce gel d'avril qui pr�c�de le vol de Prom�th�e. Qui doit intervenir au bon moment, au risque de faire voler tout espoir en fum�e. Angelin se rend � l'Etat sans �tre graci�, mais on rend gr�ce � Kadar� de faire aimer les vertus reptiliennes du froid. J. L. N.
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