Mal de Pierres Difficile d'être passé cet hiver à côté du succès bienvenu de Mal de Pierres. Rattrapage pour les autres : la narratrice raconte ici l’existence de sa grand-mère, considérée comme « dérangée » par son entourage - famille en tête - parce qu’elle aimait la poésie, et qu’elle avait cette drôle d’idée de croire au grand amour. Un mariage de raison tardif, l’enfant qui se fait attendre, et cet amour vrai inespéré venant illuminer sa vie lors d’un séjour sur le continent pour guérir de son « mal de pierre » - joli nom pour parler de calculs rénaux. Selon le principe de la petite histoire dans la grande, l’épopée familiale sur trois générations traverse les agitations du siècle dernier, et déroule sous nos yeux le soleil chantant des sublimes paysages sardes, non sans quelques détours par les villes continentales. Milena Agus allie à la perfection la plume précise des grands romanciers du 19ème siècle et l’impertinence du trait moderne, surprenant son lecteur jusqu’à la dernière page. Un pur moment de bonheur. Mal de pierres, Milena Agus, Ed. Liana Levi, 124 pages, 13 euros. Animals tristos Post coïtum… Animals tristos ! Tel est le titre de l’excellent second ouvrage de Jordi Puntí, paru cet hiver au Serpent à plumes. Six récits liés les uns aux autres, et autant d'histoires de couples, plutôt vacillants, racontées par un « je » hésitant entre distance et empathie pour ses personnages, le tout orchestré selon une savante déconstruction temporelle. Dix ans après, Mirra et Eric retournent au lieu de leur premier week-end amoureux, le temps a passé pour tous… Leif, lui, se remet avec difficulté de sa séparation d’avec Irina, tandis que Barbara et Helmut, partagés sur l’idée d’un enfant, essaient vainement de rattraper leur jeunesse. Réussissant à être original sur un canevas qu'on pensait bien usé, l’ironique Puntí touche là où ça fait mal. Il souligne avec une rare acuité la fragilité de l’amour, le désir mis en danger - par le temps, les tentations, l’ennui - toutes ces petites concessions que l’on fait avec soi, pour ne jamais avoir à demander à l’autre : à qu(o)i tu penses ? Animals tristos, Jordi Punti, Ed. Le Serpent à plumes, 215 pages, 21 euros. L'amour est très surestimé Brigitte Giraud commence à être une des voix sûres de la littérature française. Son sixième livre, l'amour est très surestimé est toujours dans les 15 meilleurs ventes (source : livres-hebdo) depuis sa sortie en avril. Ce recueil de nouvelles brille par sa sobriété, sa langue économe qui touche d'autant plus que ce sont toujours les mots simples qui vont droit au coeur. Il est question de fin de couple, comment, alors qu'on songe à le quitter, l'autre vous demande "de choisir entre une peinture ocre et une peinture sable pour la salle de bains", parce que bien sûr, c'est ça le plus important, plutôt que de s'interroger sur ce qui ne va pas, ne va plus. On parle de deuil aussi, se réveiller veuve et en vivre la vie "à côté", trouver "la juste place" entre vie qui continue et douleur à absorber, sourire pour mieux cacher la brèche intime toujours à vif, et prier pour ne pas entendre un jour l'injuste "tu l'a oublié". Sans oublier, le récit de cet été particulier lors du drame Marie Trintignant/ Bertrand Cantat, sanctionné d'un beau et glaçant "tuer n'empêche pas d'être en deuil". Une écriture de soi à (re)découvrir d'urgence. L'amour est très surestimé, Brigitte Giraud, Ed.Stock, 92 pages, 11 euros.
Maïa Gabily
Ed. 0 p / 0 € ISBN:
Lire aussi :
Articles les plus récents :
Articles les plus anciens :
|