Un trio de braqueurs, une série de cambriolages à main armée rondement menés, jusqu’à ce que tout bascule. Philippe Pollet-Villard signe son premier « roman cinématographique » rocambolesque dans l’univers de la pègre parisienne. Atypique et surprenant... "Petit à petit, c’est devenu clair pour tout le monde, j’étais devenu un gangster." Jean-Pierre Da Piedra, c’est "ce type étrange qui passe du centre bouddhiste aux attaques à main armée" . En compagnie de Bruno et Gros Marc, ses acolytes, il multiplie les petits braquages. Sa voie est toute tracée, des comptoirs aux coffres des banques : de l’argent « facile », à brûler outrancièrement façon Tony Montana : bars, filles et tout le toutim. Mais dans ce genre de profession, il faut s’attendre à tomber un jour ou l’autre. Dans le cas de Jean-Pierre, ce sera avec une balle dans la tête et une peine de 15 ans de prison ferme. Sorti du coma, il est incarcéré à la Centrale de Poissy. Il finit par s’en évader, s’octroie six mois de farniente sur la côte d’azur en compagnie d’une jolie donzelle. Le gangster endosse alors le rôle d’un pompier, parce que ces gens-là sont insoupçonnables, mais finit par se faire reprendre. Au fur et à mesure, les épisodes de sa vie rocambolesque se succèdent sur les chapeaux de roue. Jean-Pierre qui roule Entre le film noir des années 40 et le road-movie moderne, L’homme qui marchait avec une balle dans la tête relève du cinéma. L’histoire défile sous nos yeux comme une suite de séquences montées, grâce à une écriture elliptique rythmée. Porté par la voix off du personnage principal, le lecteur pénètre dans son univers : la pègre parisienne et suit son parcours de près. La vie de ce dernier est saisie sur le vif dans un long travelling avant, entrecoupé de flash back. Les yeux de Jean-Pierre figent sa réalité. C’est à travers son regard que nous avançons : « close to close ». Un récit très personnel de ses tribulations de gangster. Tournez manège Cette fameuse balle qu’il reçoit dans la tête transforme son être. Physiquement et cérébralement amoindri, il marche au ralenti. Plongé dans une sorte de brouillard, il est décalé du présent. Mais à dire vrai, Jean-Pierre a toujours été un peu fou. Il a toujours dit que la vie c’est un gros bastringue qui tourne . ce manège bien huilé avec plein de petits véhicules posés dessus : le petit camion de pompier ; le cheval noir, la fusée…. C’est un peu comme jouer au cow-boys et aux indiens ou au gendarme et au voleur. On choisit sa place. Il y a ceux qui savent tout de suite laquelle, et les autres. La première catégorie, Jean-Pierre sent très vite qu’il ne veut pas y appartenir. Il cherche. Vivre... Au gangster se mêle donc le philosophe. Un homme-enfant d’action et d’analyse rongé par le vide et l’ennui, en quête de sens. Une association étrange et décalée qui fait de lui un drôle d’illuminé et donne à ce premier roman toute sa fraîcheur et son originalité. Bascule des valeurs Ce qui intéresse Philippe Pollet Villard est moins de décrire l’univers de la pègre que de montrer la folie du monde. Il s’écarte d’un banal récit policier stéréotypé pour donner vie à une histoire tragi-comique étonnante. Ici toutes les valeurs sont renversées : le bien, le mal, le juste… Par le truchement du regard naïf de Jean-Pierre, l’auteur fait tourner le manège complexe de la vie dans la graisse qui fume. Le grand panorama du monde en dessous.
Doreen Bodin
L’homme qui marchait avec une balle dans la tête Philippe Pollet-Villard Ed. Flammarion 345 p / 20 € ISBN: 9782080690
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