14 Jui 2010 |
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La Bretagne ne se cantonne pas à la forêt de Brocéliande et ses légendes arturiennes ni aux contes d’été d’Eric Rohmer. Il en existe une autre plus tourmentée… Celle qui appartient à Marie Legall, celle qu’elle nous livre dans son premier roman à travers son histoire familiale… Quête identitaire qui passe par la reconstitution généalogique. Voilà une manière de percevoir La peine du menuisier. Mais c’est aussi et surtout l’histoire d’un décalage générationnel entre un père et sa fille. Dans le Finistère des années cinquante, archaïque et campagnard, Marie-Yvonne l’héroÏne et narratrice est « née vingt ans après tout le monde ». Le menuisier avait cinquante deux ans. Elle est ainsi très tôt confrontée à la mort, omniprésente dans cette famille. Des âmes enfermées dans des cadres photos, conservées dans les secrets et les non dits. L’enfant s’interroge donc sur la disparition des enfants, des vieux et tente de retracer son arbre généalogique. Elle s’emploie indirectement à percer le secret du Menuisier, ce père solitaire, taciturne et silencieux. « Ombrageux, inaccessible. Je l’ai peu vu sourire. (…) Nous avons fait connaissance dans un mutisme absolu. » Cette absence de la parole représente le fil conducteur du roman et la filiation entre Marie et le Menuisier. De l’abîme silencieux, Marie Legall fait surgir la parole enfouie et reconstruit une relation avec son père. À partir de bribes de souvenirs, elle recompose, par les mots, cette histoire manquée. Elle lève ainsi les questions laissées sans réponse lorsqu’elle était enfant, les secrets, les non-dits et les murmures. L’écriture est pudique et précise. Les phrases et les mots sont taillés pour tendre à une vérité juste et profonde Les pages qui se tournent sont chargées d’émotions intenses qui ne peuvent laisser insensible. Difficile de ne pas être touché par cette non rencontre entre un père et sa fille. Un effet qui tient d’ailleurs moins au récit en tant que tel qu’à la manière dont il est raconté. Un livre magnifique. Marie Le Gall A l'occasion de la publication de son premier roman, Zone littéraire avait rencontré Marie Legall il y a quelques mois. Le sujet de votre premier roman La peine du menuisier est-il né d’une nécessité ou d’une envie ? Comment avez-vous procédé pour l’écrire : avez-vous réalisé un synopsis préalable ou avez-vous écrit au fil de vos souvenirs d’enfance pour ensuite réorganiser l’ensemble ? La mort est omniprésente dans votre roman, surtout au début. Cette fascination de votre narratrice était-elle un passage obligé pour retrouver sa filiation ? Malgré le caractère tragique des souvenirs évoqués et de la relation avec votre père, votre écriture reste toujours pudique, bien que bouleversante. Comment avez-vous travaillé ? Comment se fait l’apprentissage du langage dans une famille où le silence domine ? Qualifieriez-vous Marie de « rêveuse »? Vous dites « être entrée en lecture comme on entre en religion ». Pouvez-vous développer ? Ce premier roman a –t-il été douloureux à écrire ?
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