C\'�tait il y a dix ans. C\'est fou comme le temps passe vite ! Certains intellocrates d�sign�s Nouveaux r�actionnaires se dressaient en d�fenseur des valeurs morales. En face, les intellectuels criaient � la trahison et faisaient un triste bilan de la pens�e fran�aise. C\'�tait il y a longtemps. Vraiment longtemps ? Non. Ouvert il y a quelques mois, tout juste, avec le Rappel � l�ordre de Daniel Lindenberg, le d�bat sur les \"NR\" s\'est �touff� de lui-m�me. Que sont nos amours devenues ?

Il y a six mois, lorsqu�on se promenait sur le boulevard Saint Michel, on croisait � coups s�re quelques �tudiant fra�chement sortit de la Sorbonne avec le num�ro du Nouvel Obs � Faut-il devenir r�ac ?�. A cette question l�un d�eux r�pondait, � Non, je suis de g�che �. Les parents �taient-ils si radicaux ? On peut en douter. A notre �poque, il a suffit que sonne le Rappel � l�ordre pour que le dictionnaire des �tiquettes (pardon des courants) intellectuelles accueille le terme de Nouveau R�actionnaire. Ce courant qui traduit le retour des th�mes aux saveurs un peu oubli�es : l�ordre, l�autorit�, la restauration des sacro-saintes valeurs. Mais est-il pour autant l�gitime d�avoir les Nouveaux R�actionnaires plac�s juste avant le Nouveau Roman dans nos dictionnaires ?

Aux armes etc...

Mais o� est pass� notre vieil intellectuel de \"g�che\" ? L� ou autrefois il s�insurgeait, en rouge, contre toute forme d�ordre moral, il exige aujourd�hui le bleu des villes. Ne manque plus qu�� notre individu de rev�tir la blouse blanche et il sera d�s lors le parfait garant du drapeau tricolore. Faut-il rompre avec l�esprit de 1968 ? La r�volte du mois de Mai 68 resurgit dans le d�bat public � la veille de l��lection pr�sidentielle comme si le scrutin de 2002 avait pour fonction de reproduire celui de 68 en terrassant l�anarchie et la chienlit. Il y flotte comme un parfum d�exorcisme. Il faut absolument appeler le p�re Merrin. On ne reviendra pas ici sur le dilemme � p�dagogie d��coute � versus � rigueur sarkozienne � pour qui � l�homme de gauche � est un tartuffe qui passe devant la porte de Saint-Ouen en hurlant \"Mon Dieu, les pauvres !\". Et de s\'en aller souper en ville.

Pierre, Alain, Max et les autres

Daniel Lindenberg se pr�sentait donc en porte-�tendard d�une pens�e qui va mal. Au menu de son rappel � l�ordre, la salade du chef ou comment fustiger ses hommes qui s�opposent � la pens�e 68. Ingr�dients : prenez un Finkelkraut dans son combat juda�que, ajoutez-y un Houellebecq entre le tribunal (pour son amour de l�Islam) et une place au Panth�on des auteurs du moment, un petit Max Gallo et une cuill�re de Debray, vous obtenez un amalgame terrible mais n�anmoins �pic�. Car les Nouveaux R�actionnaires ne forment pas (faut-il en parler au pass� ou au pr�sent ?) un mouvement structur� et conscient avec ses tribuns charismatiques, ses �coles et ses querelles... d��cole. Ce sont quelques antipathies communes sur l�anti-anti qui les regroupent. Peu rassembleur comme discours.

A toutes �poques ses courants

C�est amusant cette manie qu�on les gens de donner une �tiquette � quelque pens�e que ce soit. Certes, il y a bien quelque volontaires pour rappeler que les am�ricains ne sont pas les m�chants et que l�Islam n�est pas toujours le gentil. Non les enfants, n�ayez pas peur, les Nouveaux R�actionnaires n�existent pas. Faut-il s�insurger contre des d�clarations de la sorte ? Et crier � la r�action nouvelle ? Quelque mois se sont �coul�s, notre ami de gauche a remis son �charpe rouge et revient � la contestation - politique int�rieure oblige. Houellebecq, Dantec et Gallo pr�parent ou sortent leurs derni�res �uvres. Ils n\'existaient pas mais ils sont bien encore bien en vie. Linderberg avait beau terminer son Rappel � l�ordre en concluant que le milieu intellectuel fran�ais ne se portait pas si bien que �a, et doit aujourd\'hui se rassurer. Le boulevard Saint-Germain garde de sa fra�cheur. Un bus, deux bus passent, et le milieu intellectuel se porte.


Charles Patin O�coohoon