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USA 2008, la campagne litt�raire
Obama pr�sident ! Traditionnellement � lib�raux � - au sens am�ricain du terme � les �crivains ont r�uni leurs forces pour d�fendre � leur � candidat. Si beau, si classe, si romanesque. Inimaginable il y a � peine quatre ans quand les journalistes demandaient encore au futur pr�sident d��peler son nom. Il n�y avait gu�re � l��poque que les sc�naristes de 24, la s�rie, pour imaginer un pr�sident noir. La r�alit� se trouve �tre, comme au sortir du 11 septembre, plus forte que la fiction. Ne reste aux litt�rateurs que le pamphlet, ce dont nombre d�entre eux ne se sont pas priv�s. Ainsi, William Gibson met ce post hilarant sur son blog, � propos des Am�ricains qui n�avaient pas encore choisi leur poulain � quelques jours de l��lection : � Sont-ce des acteurs professionnels ou simplement des sous-dou�s qui veulent attirer l�attention sur eux ? Je m�imagine � leur place dans un avion : le steward descend l�all�e avec son chariot de nourriture et le gare pr�s de mon si�ge. Et me demande : � voulez-vous le poulet ? Ou pr�f�rez-vous le plat de merde accompagn� de son verre pil� ? � Etre ind�cis dans cette �lection reviendrait � demander comment le poulet est pr�par� �.
R�alit� post-9/11
Finalement dans la grande guerre r�publicain versus d�mocrate qui vient de se jouer, le plus dur �tait de trouver des supporters du c�t� obscur de la Force. Il y en a pourtant. La revue Bookslut relevait en 2004 les auteurs rang�s du c�t� de Bush et fils, au travers de leurs donations au parti de l��l�phant � d�ailleurs publiques et consultables sur www.opensecrets.org. En pr�cisant qu�il y avait certainement plus de r�publicains favorables � l�avortement que de r�publicains �crivains� Sans surprises, et sans pr�juger de leur qualit�, ces derniers se rangent dans une cat�gorie bien d�finie : les auteurs de polars scientifiques ou de techno-thriller, la plupart du temps ultraconnus. On pourra citer Mary Higgins Clark (le myst�re de No�l, O� est tu maintenant), Robin Cook � l�inoubliable auteur de� euh�. l�inoubliable auteur � ou l�in�narrable Tom Clancy, qui a d�dicac� son premier roman Octobre rouge � Ronald Reagan : ceux-l� sont vraiment les purs et durs. Tout comme Dean Koontz, le g�n�rique de Stephen King en mati�re d�horreur, qui a donn� 1000 $ � George W. Bush en 2000 et en tout pr�s de 30 000 $ depuis deux ans ! Le dit King est d�ailleurs un fervent d�mocrate, avec � son compte plusieurs dizaines de milliers de dollars de donation au parti de l��ne. Comme le remarque Bookslut, et comme l�intuition le dicte naturellement, les auteurs litt�raires pur sucre ne sont que rarement de droite : Jonathan Safran Foer (Tout est illumin�), Chuck Palahniuk (Peste) sont �videmment des soutiens d�mocrates, tout comme Isabel Allende (In�s de mon �me). A notre grand regret, le jeune auteur pop et avant-garde, exigeant artistiquement ET r�publicain reste � trouver. De mani�re g�n�rale, et la France n�a pas �chapp� � la r�gle en 2007, la c�sure droite-gauche se fait exactement � la s�paration entre apparratchiks et intelligentsia : Weitzmann et Gallo d�un c�t�, Jean-Michel Ribes et Pierre Berg� de l�autre. Malgr� l�engagement marqu� des �crivains et des medias litt�raires outre-Atlantique, qui ont tous peu prou propos� leur lecture critique de l�actu, on ne peut pourtant pas dire que la culture fut un enjeu dans la campagne. Il faut dire que les fonds sont essentiellement priv�s aux USA, l�action f�d�rale est tr�s r�duite et l�action gouvernementale pratiquement inexistante. Tout juste aura-t-on eu quelques indices sur les go�ts litt�raires des deux protagonistes, la liste est d�ailleurs sensiblement plus longue du c�t� d�Obama : Philip Roth, Steinbeck, Graham Greene, E.L. Doctorow, Nietzsche, Frantz Fanon, Soljenitsyne, Burghardt du Bois, Malcolm X, Primo Levi, Toni Morrison, Doris Lessing, Nelson Mandela, Reinhold Niebuhr. McCain et lui partage n�anmoins un grand ancien en la personne d�Ernest Hemingway : Pour qui sonne le glas a �t� une exp�rience fondatrice pour l�ex-militaire, qui avoue aussi un faible pour Somerset Maugham et Rudyard Kipling, � le proph�te de l�imp�rialisme britannique �, selon Orwell. Assez raccord avec la doctrine Bush, si l�on y r�fl�chit � deux fois.
"What's your story"
Plus que la litt�rature, c�est la narration a tenu une grande part de la campagne : � story � contre � story �, celle d�Obama l�a remport� haut-la-main, elle �tait trop belle. M�me celle, au parfum si Eastwoodien, du v�t�ran tortur�, h�ros patriote, rebelle et t�te br�l�e dans son propre parti, n�y a pas r�sist�. Il faut dire qu�Obama convoque plusieurs si�cles d�histoire sur trois continents. Am�rique, Afrique, Europe r�unies au coin du feu : de l�esclavage au l��mancipation, de la chr�tient� � l�Islam : une sorte de synth�se parfaite. Les sujets de romans ne manquaient pas dans les �quipes de pr�sidentiables, comme le rappelle Joan Didion, dans un article du New York review of books. M�me le plut�t terne s�nateur Bidden, colistier de Barack Obama en avait une belle en soute : cette nuit noire o� sa premi�re femme fut tu�e au volant en faisant des courses de No�l et o� il dut rejoindre seul en train ses enfants survivants. Tragique comme du Paul Auster. Quant � Palin, la chasseuse d�ours pro-life, son profil rigolo-r�ac� aurait fourni une bonne trame � John Irving ou � un Scott Heim pour la version white-trash. Presque dommage que sa d�faite la rel�gue dans la Twilight zone d�volue aux losers dans la politique am�ricaine... Laurent Simon
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