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10

Oct

2006

Après moi le déluge?
Écrit par Laurence Bourgeon   
Rescapé d’une catastrophe climatique ou humanitaire assez trouble, Snowman s’efforce de survivre tout en quêtant les potentiels résidus d’humanité alentours. Genèse d’une catastrophe annoncée où l’apocalyptique le dispute à un réalisme futuriste et inquiétant.

Bienvenue dans un monde où vieillir n’est plus synonyme de ride, où les mutations génétiques ont progressivement annihilé toutes les espèces animales traditionnelles, où l’éducation et les loisirs des enfants se tournent vers le virtuel, où les suicides deviennent des spectacles retransmis sur Internet, où la culture est réduite à néant, l’obsession sécuritaire ayant vidé tout lieu public d’une foule susceptible de réveiller les instincts de terroristes en quête s’attentat.
Un monde sécuritaire, ultra sécurisé, dans lequel l’homme peut certes s’émanciper de certaines préoccupations sanitaires et matérielles, mais au prix d’un univers aseptisé, manipulé et frelaté guère plus enviable. Car à force d’immuniser l’homme contre tous les dangers, c’est de la substance même de la vie qu’on le prive.

Un autre monde est possible ?
Dans un futur peut-être pas si lointain, une sphère de quasi surhommes industrieux et dévoués s’activent au sein des compounds (sorte de quartiers privilégiés à la fois socialement et intellectuellement) tandis que les plèbezones abritent le reste de la population, faillible, vicieuse et corrompue mais ressemblant à s’y méprendre à l’humanité telle que nous la côtoyons aujourd’hui..
Dichotomie des goûts et des couleurs, des conditions de vie et de sécurité. Si la lutte des classes n’est pas à l’ordre du jour dans un monde cloisonné au sein duquel la dictature de l’immortalité et de la perfection règne, un message politique proche de celui d’Orwell ou de Huxley est clairement sous-jacent. La manipulation et la déshumanisation est en effet au cœur de ce roman dans lequel, entre manipulation génétique et conditionnement moral, émergent les Crakers, humanoïdes aux émotions et aux désirs chronométrés et contrôlés, sans poil et sans reproche.
Rien à voir avec Snowman qui, dans une autre vie, s’appelait Jimmy. Il était ce qu’on peut sans doute appeler un médiocre mais il aimait la vie. Aussi comprend-on ses souffrances et ses appréhensions lorsqu’on le voit réduit à l’état de quasi Robinson Crusoé, confronté aux éléments et à la frugalité des repas servis par les Crakers, uniques autres survivants. Arpentant les quelques mètres carrés de nature qui l’entourent et les méandres de sa mémoire, Snowman retrace les voies de la création de la nouvelle existence qui le guette, résultat de l’ubris du démiurge Crake, son ancien meilleur ami, auquel une jalousie amoureuse a fait perdre la tête et a déclenché des passions destructrices. C’est sous les auspices d’une nouvelle cosmogonie au sein de laquelle Gaïa et Ouranos se verraient remplacés par Oryx et Crake - dont les voix rythment le récit - que se dévoile l’écheveau des complexités passées.

Et dire qu’au festival America, Margaret Atwood assurait qu’elle avait écrit un roman optimiste. Que sera-ce lorsqu’elle couchera par écrit ses idées les plus noires ? Car c’est bien la vision apocalyptique et prophétique d’un monde qui va à vau-l’eau. Le tout brillamment charpenté, visionnaire jusqu’au malaise et cynique à souhait. En 1981, Margaret Atwood s’interrogeait sur La vie avant l’homme. Ici, c’est plutôt la vie après l’homme qu’elle questionne. Et la description à la fois cynique et brillante, inquiétante de lucidité et de précision qu’elle en fait dans ce qui relève autant de la science fiction que de la politique fiction a de quoi faire frémir. Elle emprunte en effet autant au John le Carré de The constant gardener qu’à Orwell et sa novlangue propagandiste et simplificatrice et réjouira même les lecteurs les moins adeptes du roman d'anticipation.
Une chose est sûre, une fois la lecture de ce roman achevée, et en attendant le prochain ouragan, on est pris d’une furieuse envie de croquer la vie, de s’imprégner du quotidien dans sa trivialité la plus banale, et de consolider ses relations aux autres. Et ce n’est sans doute pas le moindre mérite de ce roman. Espérons simplement qu’une telle prophétie ne s'accomplira pas.

Laurence Bourgeon

Le dernier homme
Margaret Atwood
Ed. Robert Laffont
398 p / 22 €
ISBN: 2221101014









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