#115 - Du 10 f�vrier au 01 mars 2009

Actu Entretiens Zoom Portraits Extraits

  Un buzz pour rien (ou pas grand chose)  
  C'est le Printemps ! (rires)  
  Un ruban pour J.K. Rowling  
  Orgueil, pr�jug�s et Zombies  
  Bruno de Cessole obtient deux magots  
  L'�crivain am�ricain John Updike est mort  
  Marcel Schneider est mort  
  Rambaud jug� incorrect  
  Des citrons pour Orange ?  
  Mort d'Harold Pinter  

inscription
d�sinscription
 
Pavel Hak : l'Art de la guerre

Entre violence et harmonie, les romans de Pavel Hak ne peuvent laisser de glace. Pour Zone Litt�raire, et dans un d�cor de biblioth�que, l�auteur tch�que se livre intimement... Portrait.

L��crivain tch�que est souriant : il explique que le lieu lui pla�t, et il est vrai que l�ambiance est tamis�e� Dans le sous-sol du caf�, les recoins sont accueillants, et les reliefs semblent emprunt�s � des d�cors d�anciennes salles de cin�ma. Quelque chose se passe, en somme : comme si les langues se d�liaient plus facilement, et que l�air ambiant inclinait � la confession. L�Ogre � plumes peut d�ployer ses ailes...
Le regard de Pavel Hak est franc, expressif. Sa langue roule l�g�rement les � r �, mais il ne cherche jamais vraiment ses mots : il n�est en France que depuis 1986, et pourtant, on jurerait qu�il est ici depuis toujours� On avance alors que les titres de ses derniers romans, Trans et Sniper, semblent taill�s au couteau. Des titres qui tranchent dans la douceur, comme s�il fallait annoncer la couleur d�s le d�but � car la violence est partout� M�me si Trans, comme on s�en rend compte tr�s vite, parle surtout d�amour : � Une histoire d�amour avec le monde, avec la vie, explique Pavel Hak. Cette dimension du texte est tr�s claire, malgr� la vitesse du texte et les sc�nes de violence� �
Il est vrai qu�il y a de quoi, � la lecture de certains passages, avaler bruyamment sa salive. On parcoure des sc�nes de viols, de morts atroces, puis des sc�nes de pure banalit�. � C�est une d�marche d�exploration et d�invention. Je voulais montrer ces gens-l� sans maquillage, ancr�s dans le r�el : sans rien embellir, mais sans enlever non plus les �l�ments d�rangeants. La litt�rature doit g�rer tous ces aspects, et ne pas les censurer, ni les rejeter : car si elle expurge tout �a, �a devient un �chec� Quelque chose d�absurde. Le rapport � la v�rit� est tr�s important, m�me s�il est tr�s difficile � g�rer : car on n�est pas non plus l� pour choquer, ni pour avancer je ne sais quelle violence injustifi�e. �
On l��coute parler, et devant tant de douceur, de sensibilit� et d�indulgence, on se demande comment l�on peut arriver � coucher sur le papier des images si dures� Mais un v�ritable �crivain doit savoir ma�triser les distances, tout en puisant dans le concret. Pavel Hak excelle dans les images et les descriptions visuelles, et sait faire partager ses visions les plus noires. M�me si tout est toujours tourn� vers la vie...
Immigrant song
Dans Trans, le personnage de Wu Tse est clandestin � une destin�e que Pavel Hak ne conna�t que trop bien, pour l�avoir v�cue lui-m�me plus jeune, alors qu�il �migrait ill�galement vers l�Italie. A ce moment pr�cis, on sent que l�auteur ne veut pas trop s�appesantir sur le sujet, il explique que l�essentiel est ailleurs, dans ses livres. Mais on ne peut contourner ce qui figure comme une exp�rience fondatrice : � C�est quelque chose de tr�s profond� Il faut que la litt�rature soit � la hauteur de cette exp�rience. C�est extr�mement fort. Pour ces gens-l�, c�est une lutte pour la vie, un combat profond� Quand on �crit, l�exp�rience personnelle est derri�re. Mais cette histoire, ce n�est pas une autobiographie. Moi, je veux faire de la litt�rature, je veux cr�er un univers qui puisse tenir debout, qui sois convaincant, puissant, fort, coh�rent� Aujourd�hui, on a peut-�tre un peu trop tendance � glisser vers l�autobiographie, dans le "moi-je". �
On sent que l��crivain a des convictions, mais il ne les impose jamais, le dialogue reste toujours possible. On revient alors sur la langue fran�aise, ce panache, cet outil qu�il ma�trise � la perfection (� l�oral comme � l��crit). Et l�on rappelle que Proust disait d�j� qu��crire, c��tait forc�ment �crire dans une langue �trang�re� � Oui, il faut cr�er sa propre langue, et aller contre cette autre langue que vous ma�trisez, d�une certaine mani�re. C�est l� que se situe l�invention. Il faut l�attaquer quelque part, cette langue ! Vous ne pouvez jamais �crire dans une langue standard��
Et Dieu sait comme le style de Pavel Hak n�est pas standardis� Que penser de la censure, dans tout �a ? Se sent-il enfin LIBRE dans son �criture ? La notion d�effort est partout, quand on �crit. Car qui peut dire qu�il �crit au fil de la plume ? � Dans tout r�gime politique, on doit se battre tout d�abord avec soi-m�me, pour pouvoir ensuite s�exprimer. L�expression n�est pas �vidente, elle n�est pas imm�diate� �
On sent un auteur libre de ses actes, libre de ses �crits. � Pour Sniper, c��tait exactement cet univers-l� : un travail sur la th�matique de la guerre� Ce n�est qu�ensuite, apr�s ce long travail, que j�ai pu �crire Trans. Dans ce livre, j�ai privil�gi� la pratique profond�ment romanesque, avec ces sc�nes comiques, tragi-comiques, burlesques, loufoques. J�en avais besoin, car l�univers dans Sniper �tait extr�mement lourd. Il ne fallait pas que cela m��crase, que cela m�enfonce� C�est pourquoi j�ai �cris Trans avec cette fatalit�, ce mouvement romanesque puissant ; car il contient beaucoup d�humour, malgr� son univers violent. �
Trans peut para�tre froid et m�tallique... Mais c�est une rigidit� qui trouve toujours, en �cho, une douceur infinie : comme si l�histoire d�amour, qui lie Wu Tse et Kwan, �tait � prendre comme le fil conducteur de tout le roman. Le reste n��tant que jeux d�oppositions : � C��tait int�ressant de jouer sur l�imbrication de l��tre humain, encore vivant, et donc conscient, avec ces dispositifs de pouvoir, extr�mement durs, inhumains souvent, qui vous d�shumanisent, qui vous transforment en marchandise, qui vous exploitent comme pure force de travail. C�est cette modernit�-l� que l�on vit : car j��cris aussi sur le futur. �
On l�aura compris : la litt�rature de Pavel Hak est une litt�rature du risque, qui ne flirte jamais avec le confort. L��crivain tch�que travaille une �criture viss�e dans l�invention, mais aussi dans une grande part de visuel. Par un savant jeu d�images et de mots, l�auteur peut ainsi aller tout droit vers l�essentiel : la r�alit�.

Julien Canaux

Photo: Sebastien Dolidon
www.dolidon.fr

Trans de Pavel Hak, �ditions du Seuil,
187 pages, 15,11 euros.

 
Jean Cocteau 
Jérôme Lambert 
Arnaud Cathrine 
Jonathan Ames 
Pavel Hak 
Arno Bertina  
Max Monnehay  
Céline Minard  
Alain Foix  
Philippe Labro  
François Rivière  
Jean-Pierre Cescosse  
Grégoire Hetzel  
Patrick Besson  
Vincent Borel  
Nicolas Rey  
Eric Pessan  
Chlo� Delaume  
David Foenkinos  
Catherine Cusset  
Serge Joncour  
Viencent Ravalec  
Gabriel Matzneff  
Philippe Besson  
Eric Faye  
Pierre Vavasseur  
Fred Vargas  
Nora Hamdi  
Florian Zeller  
Aurore Guitry  
 
Victoria Bedos  
 
Franck Resplandy  
Alex D. Jestaire  
Charly Delwart  
Olivia Rosenthal  
Olivier Adam  
Cyril Montana  
Christophe Paviot  
Martin Page  
 
Bertrand Schefer  
 
  ARCHIVES
 
contact | © 2000-2009  Zone littéraire |